Au fil du document, l’équipe Bouchet procède de différentes manières pour présenter un bilan flatteur de son action à la tête de la ville. D’abord, par la répétition : certains items, comme l’année Balzac organisée en 2019, apparaissent à de nombreuses reprises au fil des pages, manière de gonfler un peu la liste des réalisations de la majorité municipale. Ensuite, par la mise en avant du rang de la ville dans des classements complètement bidons : « 3ème ville pro-business », « 1ère métropole par la qualité de son air » ; « 1ère ville de France avec le plus grand nombre de kilomètres cyclables par habitant »… Enfin, en s’appropriant des réalisations qui n’ont pas grand-chose à voir avec la municipalité en place, mais qui ont été le fruit d’un travail (ou d’un lobbying) combiné de différents acteurs : métropole, députés, État, etc. ; c’est le cas pour le passage au statut de métropole, pour l’obtention du label « French Tech » [1], ou pour l’accueil annoncé d’équipes participant aux Jeux olympiques 2024.
« Notre équipe est compétente, sérieuse et déterminée »
En 2014, lorsque l’équipe en place a été élue, le « projet » présenté sur papier glacé par l’équipe de Serge Babary s’ouvrait sur une pleine page intitulée « Les promesses non tenues de Jean Germain ». On pourrait procéder au même exercice en comparant « le projet » et « le bilan » de l’équipe Babary-Bouchet. Par exemple, on espérait beaucoup du grand bal Renaissance costumé et du banquet gastronomique en plein air que nous promettait Serge en 2014. Mais on est obligé de constater qu’il n’a jamais vu le jour, et que le bilan présenté aujourd’hui par Christophe Bouchet ne prend même pas la peine d’expliquer pourquoi cette alléchante promesse a été trahie. Évidemment, les vingt pages du document distribué par l’équipe Bouchet sur les marchés et dans les boîtes aux lettres ne s’attardent pas sur les multiples fiascos qui nous ont tant fait marrer ces six dernières années.
Au chapitre « politique participative et gouvernance ouverte », l’équipe Bouchet se félicite de la « création de 8 conseils de quartier », alors qu’il ne s’agit que d’un relifting des conseils de vie locale [2]. Plus loin, il est question de la diffusion du conseil municipal en vidéo, et il est précisé que « l’objectif est d’ouvrir le plus largement possible l’accès aux débats », alors que les documents indispensables à la compréhension des délibérations ne sont pas rendus publics (en particulier les « cahiers des délibérations » qui sont pourtant distribués à la presse). Sur la même page, au chapitre « Grands projets », on trouve l’ « aménagement du Haut de la rue Nationale », alors que ce désastre urbanistique a été impulsé par l’équipe précédente.
« Nous ne faisons que des promesses que nous pourrons tenir »
Le chapitre « la sécurité pour priorité » s’ouvre sur un slogan qu’on trouvait sur les affiches du Front National quand Marion Maréchal-Le Pen avait encore l’âge de poser dans les bras de son grand-père [3]. Au volet, « une police municipale renforcée », l’équipe Bouchet n’évoque ni les difficultés de recrutement auxquelles elle a dû faire face, ni le vol de cartouches au sein même de l’armurerie de la police municipale en 2016. Le renforcement des effectifs, de 95 à 110 flics, a été décidé en juillet 2019 et n’est probablement même pas effectif, mais devrait coûter 600 000 euros par an à la collectivité, ce que le tract se garde bien de préciser.
Histoire de faire bonne mesure, les auteurs du document évoquent aussi la « création des agents de surveillance de la voie publique ». Leurs missions n’ont pas grand-chose à voir avec la sécurité, certains agents municipaux ont été affectés à ces unités contre leur gré [4], mais ça vient gonfler le bilan. Autre réalisation mentionnée ici : le « déploiement de 4 quartiers Voisins vigilants à Tours Nord », qui avait occasionné une sortie raciste hallucinante de l’adjoint à la sécurité Olivier Lebreton.
« Notre programme est solide, réaliste et répond à vos attentes »
Il serait trop fastidieux de reprendre tout le document page par page, tant la présentation de certaines réalisations est grotesque. On voit que la majorité sortante a voulu donner l’image d’une équipe efficace, « au service de Tours et des Tourangeaux », comme l’annonce le bilan en première page. Pourtant, il y aurait un autre bilan à dresser de l’action de cette municipalité.
Sans chercher à être exhaustifs, on peut citer quelques épisodes marquants de ce mandat : l’annulation du festival Tours et ses Francos Gourmandes après une seule édition ; la suppression de la gratuité de la cantine pour les enfants les plus pauvres ; l’apologie de la fraude fiscale ; la condamnation de la ville en raison de l’illégalité de ses arrêtés anti-mendicité ; le soutien aux commerçants qui ne respectent pas les dispositions réglementaires sur les enseignes lumineuses ; le coup de colère de l’adjoint aux transports contre les cyclistes ; le soutien à l’installation d’enseignes connues pour leur politique d’évasion fiscale ; la mise au point d’un plan de « renouvellement urbain » au Sanitas sans concertation avec les habitant-es ; la fermeture du centre socio-culturel du quartier des Fontaines ; le fiasco autour de la donation Cligman, que la municipalité voulait installer dans le jardin du musée des Beaux-Arts ; la poursuite du soutien à l’aéroport de Tours, gavé d’aides publiques ; la médiocrité des festivités organisées autour de Martin de Tours... Rappelons aussi que Christophe Bouchet, candidat à la réélection, n’est même pas capable de remplir correctement une déclaration d’intérêts. Heureusement, pendant ces six années, l’équipe municipale a pu bénéficier de la complaisance des médias locaux.
Intertitres tirés du programme de la liste « Tou(r)s ensemble » en 2014.