Pour la deuxième fois, la Cour administrative d’appel de Nantes a été amenée à se prononcer sur un arrêté anti-mendicité pris la ville de Tours. Et pour la deuxième fois, les juges ont annulé cet arrêté, estimant que « l’interdiction décidée par l’arrêté du 16 mai 2014 (...) n’est pas justifiée par la nécessité de remédier de manière proportionnée à des risques significatifs et établis de troubles à l’ordre public ».
Cette fois-ci, l’arrêté n’avait pas été pris par Jean Germain, l’ancien maire PS, mais par Serge Babary (Les Républicains), élu en avril 2014. Quelques semaines seulement après sa prise de fonctions, il avait poursuivi la politique anti-pauvres entamée par son prédécesseur, en publiant un nouvel arrêté interdisant :
« toute occupation abusive et prolongée des rues et autres dépendances domaniales, accompagnée ou non de sollicitations ou quêtes à l’égard des passants, accompagnée ou non de chiens, même tenus en laisse, lorsqu’elle est de nature à entraver la libre circulation des personnes, la commodité de passage et la sûreté dans les rues et autres dépendances susvisées. »
Comme l’a relevé la cour de Nantes, un tel arrêté « est de nature à affecter de façon spécifique la liberté d’aller et de venir de personnes, en particulier celles se trouvant en situation précaire ». L’objectif des élus locaux a toujours été clair : il s’agit de pouvoir chasser du centre ville les SDF, quand bien même ils ne commettraient aucune infraction.
La ville a bien essayé de se justifier en produisant des extraits de main-courantes de la police municipale, relatant « la présence fréquente de personnes sans domicile fixe ou s’adonnant à la mendicité ». Mais pour les juges, « très peu d’entre eux font état de comportements agressifs de la part de personnes occupant de manière prolongée les rues du centre ville ou de réels troubles pour l’ordre public, la majorité des "incidents" relatés concernant (...) la simple présence de personnes sans domiciles fixes ». Ce que la ville reproche à ces personnes, c’est simplement d’être là.
En plus d’annuler l’arrêté, la Cour administrative d’appel a condamné la Ville à verser 1 500 euros à la Ligue des Droits de l’Homme, qui avait attaqué l’arrêté, au titre de ses frais de justice.
Si l’annulation de ce deuxième arrêté était attendue, cela n’a pas empêché la mairie de Tours de s’entêter, en prenant un nouvel arrêté du même type le 15 mai 2017, pour une durée de plus de quatre mois. Et cette fois-ci, le maire a imaginé de s’appuyer sur le risque d’attentats pour justifier sa décision, instrumentalisant sans vergogne l’état d’urgence. La Ligue des Droits de l’Homme a déclaré qu’elle étudiait la possibilité d’introduire un nouveau recours.