Traitement des étrangers : entre illégalité et inhumanité
Au bilan de Corinne Orzechowski, on peut citer plusieurs condamnations ramassées par la préfecture d’Indre-et-Loire, notamment pour avoir fait enfermer une demandeuse d’asile originaire de Guinée et pour avoir placé en rétention une famille, enfant de six ans compris. On peut aussi citer l’expulsion illégale d’un ressortissant centrafricain, ainsi que celle d’un ressortissant soudanais vers son pays d’origine, alors en proie à de graves violences, et ce malgré les protestations de la Cimade et d’Amnesty International. Dans un communiqué de janvier 2020, la Cimade avait relevé que « la préfète d’Indre-et-Loire [faisait] preuve d’un zèle inédit » [2] ; sans doute incommodée par les protestations de l’association, la préfète avait pendant un temps bloqué le compte de l’association sur le réseau social Twitter.
Au-delà de ces quelques cas emblématiques, Corinne Orzechowski s’est révélée être un agent zélé des politiques racistes du gouvernement à l’encontre des personnes étrangères.
Maintien de l’ordre : foire aux interdictions et ultraviolence
On a rarement vu une préfète mentir avec autant d’aplomb que Corinne Orezchoswki. Les multiples arrêtés pris pour interdire les manifestations, notamment pendant le mouvement des Gilets jaunes, ont été une longue suite de mensonges et d’affabulations [3]. L’une des méthodes employées par la préfecture a consisté à retarder au maximum la publication de ces arrêtés d’interdiction, de peur de les voir annulés par le juge administratif, par exemple lors de la venue d’Emmanuel Macron à Amboise. À cette occasion, les organisations syndicales avaient dénoncé« une atteinte aux libertés individuelles et collectives qui illustre parfaitement la dangereuse dérive autoritaire de l’exécutif ».
Autre volet de la répression organisée par la préfète, sa manière de couvrir les violences orchestrées par les flics chargés du maintien de l’ordre. Sous ses ordres, la police a eu les coudées franches et a bénéficié d’un soutien sans faille, qu’ils tabassent des lycéens ou mutilent des manifestant·es. Orzechowki n’a jamais eu un mot pour les victimes de violences policières, ni pour les journalistes délibérémment visés par des tirs de LBD40. Au moment de son départ pour l’Oise, elle a d’ailleurs confirmé sa position dans un entretien à La Nouvelle République, mélangeant mensonges et cynisme :
« Le 1er décembre, j’ai vu ces types en noir qui ont attaqué les policiers avec des boulons, de l’acide. Leur violence était insupportable. Si on n’était pas intervenu, ils détruisaient les magasins de la rue Nationale. On a décidé de répondre à la hauteur de leurs attaques. J’assume la violence républicaine lorsqu’elle est justifiée. Là dessus, je n’ai aucun état d’âme. » [4].
Hébergement d’urgence : laisser pourrir
En dehors de la période de confinement liée à l’épidémie de Covid-19, pendant laquelle toutes les personnes à la rue ont été hébergées, Corinne Orezchowski n’a eu aucun remord à laisser dehors des femmes, des enfants, des hommes seuls. En période de canicule comme en période de grand froid, les dispositifs d’hébergement sont systématiquement restés sous-dimensionnés. Quand, en novembre 2018, un collectif s’est monté pour occuper un bâtiment vide et dénoncer l’inertie des pouvoirs publics face à la crise de l’hébergement, Orzechowski leur a immédiatement envoyé ses flics pour évacuer le lieu. Alors que l’épidémie se poursuit et que la préfète a changé, la crise continue.
Voyageurs : la poursuite des discriminations
Interpellée par les maires d’Indre-et-Loire sur la question de l’accueil des voyageurs dès son arrivée en Touraine, la préfète a multiplié les « arrêtés de mise en demeure pour installation illicite de gens du voyage » ; le rapport d’activité des services de la préfecture en dénombrent 205 en 2018, et la préfète revendiquait en avoir signé 206 entre janvier et août 2020. Pour justifier ces arrêtés, Orzechowski se réfugie derrière le schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage, auquel les collectivités locales se conformeraient.
Pourtant, l’aire de grand passage de Pocé-sur-Cisse n’est toujours pas construite [5], celle de Tours n’a toujours pas été étendue. On n’a pas entendu la préfète stigmatiser les collectivités en infraction comme elle l’a fait pour les voyageurs, accusé de toutes sortes de « dégradations » sur les terrains occupés. Et le décompte des places d’accueil existantes ne tient pas compte du mauvais état ou de la localisation des aires, souvent situées aux confins des communes. Les discours de la préfète sur ce sujet, ainsi que la mise en scène des expulsions ordonnées par ses services, auront contribué à alimenter les discriminations dont sont victimes les voyageurs depuis de nombreuses années dans le département.
Moulin ou Bousquet ?
Lorsqu’elle a quitté ses fonctions à la préfecture de la Sarthe en 2017, Corinne Orzechoswki confiait au journal Ouest France [6] :
« Ce qui m’interpellait toujours, c’était cette question : "T’aurais fait quoi, toi pendant la guerre ? Jean Moulin ou René Bousquet ?" Quand on est face à un vrai choix pour le pays, comment bien choisir, non pas les intérêts immédiats, mais l’intérêt collectif ».
Vu le bilan de ses trois années en Indre-et-Loire, pendant lesquelles elle est restée sourde aux protestations des associations de défense des droits de l’homme, à celles des organisations syndicales, aux interpellations d’habitant·es choqué·es par ses pratiques, on sait vers quelle réponse on penche.