La préfète d’Indre-et-Loire prend de nouveaux arrêtés pour interdire les manifestations de gilets jaunes

À un mois de l’anniversaire du début du mouvement, Corinne Orzechowski a lancé une nouvelle série d’interdictions de manifester visant les rassemblements de Gilets jaunes à Tours. Au passage, elle n’hésite pas à mentir pour justifier ses mesures liberticides.

« Les cortèges, défilés et rassemblements revendicatifs sont interdits le samedi 19 octobre 2019 de 13h à 20h sur les voies empruntées par la ligne de tramway. » Dans deux arrêtés successifs, la préfète d’Indre-et-Loire a interdit les manifestations dans le centre-ville de Tours pour les samedis 19 octobre et 26 octobre [1]. Des décisions qui rappellent les interdictions édictées à tout-va au cours de l’hiver et du printemps, de Château-Renault à Amboise.

La lecture attentive des arrêtés de la préfète montre qu’elle entretient un rapport délirant à la réalité. Pour justifier ces restrictions à la liberté de manifester, elle n’hésite pas à évoquer des « pillages de commerces » qui n’ont jamais existé, et fait mine de déplorer que plusieurs dizaines de personnes aient été blessées pendant les manifestations, sans évoquer le fait que ces blessures ont été causées par les flics. Ainsi, l’arrêté mentionne « un manifestant grièvement blessé à la main », mais oublie de préciser que sa main a été arrachée par une grenade GLI-F4 balancée au milieu d’une foule calme par un policier. La préfète prétend ensuite que les rassemblements qui bloquent la circulation du tramway provoqueraient un risque pour la sécurité des personnes. Pourtant, à part quand les flics mettent au sol des personnes qui manifestent sur la voie, on n’a jamais vu quiconque être mis en danger par l’immobilisation du tram.

Des risques de blessures pour les utilisateurs du centre-ville ?

La préfète déclare aussi que le centre-ville de Tours « ne constitue pas un site approprié pour une manifestation non déclarée ou un regroupement de personnes revendicatives », parce qu’il constitue « un pôle d’attraction pour un important public ». Elle souhaiterait certainement que les manifestations aient lieu dans des zones désertes, loin des regards de la population. Elle évoque des risques de blessures pour les « utilisateurs » du centre-ville, « notamment des familles avec enfants », en cas d’affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, oubliant là aussi que ce sont avant tout les flics qui ont, lors de précédentes manifestations, mis la population en danger en balançant des gaz lacrymogène dans toutes les directions.

Pour justifier les interdictions, l’arrêté s’appuie ensuite sur la sollicitation des forces de sécurité. Celles-ci ne seraient pas en mesure d’assurer la sécurité des manifestations, notamment parce qu’elles ont d’autres missions, comme « la prévention de la menace terroriste toujours très prégnante ». L’argument est régulièrement utilisé depuis le mois de novembre 2015. Étonnamment, il ne vise que les rassemblements à caractère revendicatif, jamais les rassemblements festifs ou sportifs. Ainsi, la préfète n’a pas hésité à mobiliser 112 policiers, 47 CRS et 27 militaires pour sécuriser la course cycliste qui s’est déroulée à Tours le 13 octobre dernier [2].

Enfin, la préfète agite la menace de sanctions :

« Toute infraction au présent arrêté sera constatée et réprimée, s’agissant des organisateurs, dans les conditions fixées par l’article 431-9 du code pénal, à savoir six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende, et, s’agissant des participants, par l’article R.644-4 du même code, à savoir une amende prévue pour les contraventions de quatrième classe. »

On peut imaginer que les arrêtés de ce type vont se systématiser dans les semaines à venir, les autorités craignant probablement un sursaut de mobilisation à l’approche de l’anniversaire du début du mouvement des gilets jaunes, qui avait démarré le 17 novembre 2018.

Photographie : LaMeute.

Notes

[1Voir l’arrêté d’interdiction pour le samedi 26 octobre en cliquant ici.