État d’urgence : le préfet d’Indre-et-Loire interdit les manifestations dans le département du 28 au 30 novembre

Dans un arrêté pris par le préfet le 24 novembre, il est indiqué que « toute réunion ou manifestation de voie publique est interdite sur l’ensemble du territoire du département, quel qu’en soit le motif ». Une mesure qui devrait notamment mettre un coup aux mobilisations prévues pour le climat.

L’arrêté pris par le préfet s’appuie sur la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, mise en application le 13 novembre au soir, et prolongée pour 3 mois [1]. Il interdit :

« Toute réunion ou manifestation de voie publique (...) sur l’ensemble du territoire du département, quel qu’en soit le motif, à l’exception des hommages aux victimes des attentats du 13 novembre 2015, pendant les journées du samedi 28 novembre 2015, du dimanche 29 novembre 2015, et du lundi 30 novembre 2015. »

Sur le site de la préfecture, il est précisé que « les grands rassemblements, spectacles et manifestations festives, culturelles et sportives » sont maintenus « sous réserve d’un dispositif renforcé de filtrage et de fouilles ». Ainsi, les marchés de Noël, patinoires et autres attractions ne font pas l’objet d’une interdiction. Et ce alors même que l’interdiction s’appuie notamment sur l’idée que « les rassemblements de personnes sur la voie publique sont de nature à constituer (...) une cible potentielle pour des actes de nature terroriste ».

Ce sont donc bien les manifestations à caractère revendicatif qui sont interdites par le préfet pour la période visée. Dans le Rhône, le préfet Delpuech a été moins timide que son collègue et l’a écrit noir sur blanc dans un arrêté similaire : « Toutes manifestations sur la voie publique à caractère revendicatif ou protestataires sont interdites. Les manifestations sportives, récréatives ou culturelles ne sont pas visées par l’interdiction (...) ».

L’arrêté pris par Louis LeFranc n’invoque pas seulement « la gravité de la menace terroriste ». Il évoque aussi le sommet sur le climat qui aura lieu à Paris à compter du 30 novembre, et indique que « les risques de troubles graves à l’ordre public » liés à cet événement « mobilisent les forces de sécurité intérieure ». Si l’on comprend bien, les besoins en effectifs policiers nécessaires pour sécuriser la COP21 justifient d’interdire toute manifestation en Indre-et-Loire [2] Quitte à s’asseoir sur les libertés individuelles et collectives.

Au moins deux des manifestations prévues ce week-end dans le département sont en lien avec le sommet sur le climat : à Tours, une mobilisation était prévue le 28 novembre en centre ville par un collectif comprenant Greenpeace, ATTAC et la Vélorution ; à Loches, c’est la Convergence de défense et développement des services publics 37 qui prévoit des animations sur le marché de la ville suivies d’un débat. D’après nos informations, dans la soirée de mercredi, tous les organisateurs de la manifestation tourangelle se résignaient à annuler leurs initiatives sur ordre du préfet — initiatives qui visaient notamment à informer le public sur les enjeux climatiques. L’événement de Loches serait pour l’instant maintenu. [3]

Le week-end dernier à Paris, c’est une manifestation en soutien aux réfugié-es qui avait été interdite. Bien que la plupart des organisations ayant appelé à manifester aient jeté l’éponge, plusieurs centaines de personnes ont bravé l’interdiction, et plusieurs ont reçu depuis des convocations au commissariat [4] après qu’elles aient été identifiées par la préfecture. Depuis, des appels à braver l’interdiction de manifester circulent, notamment pour le 29 novembre.

A Tours, une manifestation de l’intersyndicale des retraité-es a été interdite mardi, et s’est transformée en rassemblement devant la préfecture. Le communiqué de la CGT s’inquiétait d’éventuelles mesures liberticides prises par le gouvernement en réaction aux attentats. Pas de doute, on est en plein dedans.

Notes

[2Il faut bien donner l’impression de se mobiliser contre la menace des « black blocs » que le gouvernement et les médias font peser sur le sommet depuis des mois.

[3[Mise à jour le 27/11/15] Depuis, une autre manifestation prévue dimanche a été interdite, cf : Une nouvelle mobilisation pour le climat interdite à Tours.

[4Deux au moins ont été placées en garde à vue.