Accueil des mineurs isolés : interpellé par un collectif, le président du conseil départemental dénonce un « effet de manche »

Ce samedi 20 avril avait lieu l’inauguration de la foire-exposition de « Loches en Fête ». Une occasion pour le collectif lochois de soutien aux migrants de mettre en avant la situation des mineurs qui sont régulièrement refoulés par les services du département et qui, sans le secours des habitants, seraient laissés à la rue.

Le soleil brille sur Loches, la foire fraichement montée bat son plein et la farandole des élus locaux déambule, avec en tête Jean-Gérard Paumier, président du Conseil départemental, Gérard Hénault, président de la communauté de commune Loches Sud Touraine, et Marc Angenault, maire de Loches, serrant à tour de bras les mains des participants pour finalement couper le traditionnel cordon d’inauguration bleu-blanc-rouge.

Ce fut donc l’occasion pour le Collectif Solidarité Migrant(e)s du Lochois de toucher un mot au président du Conseil départemental de la situation des mineurs exilés laissés à la rue par ses services. A plusieurs reprises, la collectivité a été condamnée pour avoir refusé de prendre en charge des mineurs en attente d’évaluation de leur situation. Face à cette carence caractérisée des institutions, des habitants se mobilisent pour prendre en charge l’accueil et l’accompagnement de ces jeunes.

Plutôt qu’une action militante spectaculaire avec banderoles et slogans, le collectif avait choisi ce matin de remettre simplement et sans fracas une lettre à M. Paumier afin de le solliciter quant à l’urgence du sujet. Ce dernier ne trouva rien de mieux que de qualifier la démarche du collectif « d’effet de manche » [1] auprès de la presse locale. Une nouvelle illustration du mépris avec lequel la question est traitée par les institutions locales.

De plus, pourtant tout enclin à serrer des mains en ce beau matin, M. Paumier eu d’abord une réaction de rejet face à ce courrier discrètement tendu (voir l’illustration), acceptant finalement tant bien que mal de ne rencontrer ultérieurement « qu’un seul membre du collectif » et coupant court le plus rapidement possible à cet échange en pressant la marche. Il refusa plus loin de serrer la main d’un jeune qui venait cordialement le saluer. Dans le même ordre d’idée, M. Hénault, président de la communauté de communes, s’est quant à lui déclaré incompétent avec un traditionnel « Que voulez-vous… ».

« Nous vous demandons un accueil digne, seule réponse constructive »

Le Collectif Solidarité Migrant(e)s du Lochois est né en 2018, en soutien aux exilés et aux mineurs isolés. En lien étroit avec l’association Utopia 56 de Tours, le collectif concentre la majorité de ses forces sur l’accueil et l’accompagnement de jeunes exilés dits « mineurs isolés », hébergés et pris en charge par les habitants et familles qui le composent. Ces mineurs, qui ont souvent parcouru des milliers de kilomètre pour demander l’asile en France suite à des situations politiques ou économiques tumultueuses voire chaotiques dans leur pays, sont régulièrement refoulés par les services de l’Aide Sociale à l’Enfance (gérée par le Conseil Départemental) qui, faisant fi de la loi, les laissent régulièrement à la rue lors de l’attente d’évaluation de leur minorité. Certains sont également dans l’attente d’un recours, n’ayant pas été reconnus mineurs lors de la première évaluation.

Voici la lettre adressée par le collectif au président du Conseil départemental :

Monsieur le Président,

Le Collectif Lochois Accueil et Solidarité avec les Migrants accompagne et héberge 21 jeunes, qui ont mis toute leur énergie et leur espoir à gagner la France mais votre service de Protection de l’Enfance les a sommairement refoulés. Nous avons donc entrepris des recours pour faire valoir leurs droits en tant que mineurs.

Nous sommes nombreux à nous mobiliser pour les protéger des dangers de la clandestinité et de la rue vers lesquels vous les avez jetés. Ne vaudrait-il pas mieux associer les moyens du Département, la solidarité des habitants et l’énergie des migrants pour les accueillir, notamment dans nos campagnes qui se dépeuplent et vieillissent ?

La fermeture des portes n’altèrera jamais leur volonté. Nous vous demandons un accueil digne, seule réponse constructive.

Nous vous remercions par avance de l’attention que vous apporterez et vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations distinguées

Notes

[1« Effet de manche » : Action exagérée, factice, destinée à impressionner un public par un discours grandiloquent ou des gestes emphatiques inutiles. Source.