Venue de Macron à Tours : la police protège la com’ du président

Le mercredi 14 mars, tout a été mis en œuvre par les forces de police pour maintenir à distance les opposant-es et donner l’image d’un accueil enthousiaste du président de la République.

Des dizaines de CRS pour empêcher un départ en manifestation, du gaz lacrymogène pour éloigner des étudiant-es qui se contentaient de chanter des slogans contre la loi Vidal, et enfin des policiers en civil pour exfiltrer sans ménagement les derniers opposants chantant « la loi Vidal c’est de la merde » au moment où Macron serrait des mains, devant la mairie de Tours. Un énorme dispositif aura été nécessaire pour donner l’illusion d’un accueil enthousiaste du président en Touraine.

Vers 17h30, environ 300 manifestant-es étaient rassemblé-es place Anatole France pour dénoncer les politiques du gouvernement, notamment en matière sociale et migratoire. Mais la plupart des voies partant de la place sont bloquées, impossible de descendre la rue Nationale pour rejoindre le centre-ville.

La République en Marche

Plus tard, un groupe qui a rejoint la place Jean Jaurès, où le cortège présidentiel est attendu, se fait dégager par une équipe de flics. Témoignage d’une manifestante :

« Nous étions une vingtaine de jeunes pour la plupart étudiants. Nous étions tout d’abord au rassemblement à Anatole France à 17h30, et sommes descendus vers Jean Jaurès en contournant la rue Nationale. Finalement, nous avons essayé d’approcher l’Hôtel de Ville, mais les CRS nous ont empêchés de faire la queue pour passer le contrôle. Là, ils nous ont tous poussés très violemment vers la sortie, emportant au passage d’autres personnes. Des lacrymos ont été utilisées rapidement. Les CRS ont utilisés leurs matraques, alors que le groupe de jeunes était pacifique (juste en train de chanter les chansons de manifs contre la Loi Vidal). Une CRS m’a empêchée de filmer, elle a pris mon téléphone et l’a jeté plus loin. »

Quelques personnes ont néanmoins réussi à se glisser parmi la foule qui attendait l’arrivée d’Emmanuel Macron, après avoir subi fouille et palpations par des policiers en civil équipés de détecteurs de métaux. Sur la vidéo réalisée par le reporter indépendant Alexis Kraland, on entend distinctement des « La loi Vidal, c’est de la merde » et « Macron démission » adressés au président lorsqu’il arrive enfin. Des slogans également captés par le journaliste de La Nouvelle République Nicolas Rimbaux, mais qui ne seront pas évoqués dans le journal paru le lendemain.

Ces slogans d’opposants, qui contreviennent au story telling présidentiel, vaudront à leurs auteurs d’être dégagés de la foule par des policiers en civil. Ce qui n’empêchera pas le député de Tours de parler d’un « Président de la République proche de ses concitoyens, continuellement à leur écoute et disposé à répondre à leurs inquiétudes ». Évidemment, c’est plus simple quand la police a été mobilisée en amont pour faire taire les critiques. Cet épisode, qui en dit long sur l’exercice du pouvoir, ne sera pas évoqué par la presse locale, de La Nouvelle République à 37 degrés [1], qui ont pourtant suivi les moindres faits et gestes du président. Le quotidien local a préféré insister sur une autre manière de l’interpeller :

Avant de monter les marches de l’hôtel de ville, Emmanuel Macron s’offre un bain de foule d’une quinzaine de minutes. Sous une pluie fine, les centaines de Tourangeaux sortent leur téléphone portable (sic). On se bouscule, on cherche la meilleure place. « Un selfie, Monsieur le Président, un selfie. » [2]

Le lendemain, la ministre de la Culture François Nyssen venait à Tours pour présenter le projet de loi sur les fake news.

Notes

[1Quelques images de la première intervention de la police contre les opposants place Jean Jaurès peuvent être vues dans une vidéo publiée sur 37 degrés, mais l’article associé n’en dit pas un mot.

[2"Un selfie, Monsieur le Président !", La Nouvelle République, 15 mars 2018.