Sans Canal Fixe a 20 ans et ça se fête au cinéma

Sans Canal Fixe a 20 ans. Et pour fêter ça, le collectif vous invite à découvrir (ou redécouvrir) le réalisateur Jean-Denis Bonan. En partenariat avec la Cinémathèque, une soirée carte blanche à SCF se tient au cinéma Studio lundi 1er avril à partir de 19h30.

Sans Canal Fixe est un collectif qui depuis 1999 regroupe des réalisateurs, des techniciens et des aficionados de cinéma documentaire. Par la réalisation de films, l’organisation de projections et d’ateliers, Sans Canal Fixe a pour objectif de faire découvrir et partager sa passion : celle du cinéma documentaire sous toutes ses formes.La soirée carte blanche en partenariat avec la cinémathèque sera l’occasion de découvrir deux films de Jean-Denis Bonan, dont un en avant-première et en présence du réalisateur.

L’école des fous (France, 1967-2018, 33 min), en avant-première
C’est le pays des fous. Celle ou celui qui obtient le droit d’être fou verra fleurir sur son visage des arabesques ou des traits qui font sa fierté. Le réalisateur présente ce film commencé en 1967 et achevé l’année dernière en ces termes :

En cet hiver 1967, les « fous », les acteurs de ce film, ne se considèrent pas comme malades, ils disent : « le monde ne va pas bien ». Ils sont accueillis par la clinique La Borde, près de Blois, et sont appelés « Pensionnaires ». Je voulais impressionner la pellicule de cette joie et de ce mal-être qui émergeait des personnes que nous filmions. Hélas, contre ma volonté, le montage se fit sans moi et un film sortit, que je ne pouvais pas reconnaître. 51 ans après son tournage, je reprends le montage préexistant pour être fidèle à ces émotions de cet hiver 1967.

La femme bourreau (France, 1968, 70 min)
Louis Guilbeau, bourreau, doit exécuter Hélène Picard, condamnée à mort pour les meurtres de plusieurs prostituées. Mais les assassinats continuent même après sa mort et Louis s’éprend de Solange, la jeune policière chargée de l’enquête. Réalisé avec peu de moyens, ce film passe d’un genre à l’autre (policier, érotique, documentaire et reportage). Il aura fallu attendre 2015 pour qu’il soit enfin distribué.

Yvan Petit, réalisateur et membre du collectif, témoigne du lien qui rattache SCF au réalisateur invité : « Nous avons rencontré Jean-Denis Bonan il y a une dizaine d’années, d’abord en tant membre de l’ARC et de Ciné-Luttes, deux collectifs de cinéastes militants actifs autour de mai 68. Il était venu à Tours à l’invitation de SCF, présenter quelques films de cette période (qu’on peut retrouver dans le coffret DVD Le cinéma de Mai 68 - L’Héritage, paru aux éditions Montparnasse). La découverte de ces films, comme ceux des groupes Medvedkine, ou de l’UPCB (Unité de Production cinéma Bretagne) de René Vautier, nous ont aidé à nous situer dans une autre histoire du cinéma, celle d’un cinéma collectif, politique, iconoclaste, rapide et inventif. Puis nous avons pu voir les films personnels de Jean-Denis Bonan, longtemps invisibles car censurés. Une œuvre multiforme, alternant films courts et longs, mêlant fiction, documentaire, et expérimentations, films pour le cinéma et œuvres pour la télévision, durant la courte période d’ouverture suivant l’arrivée au pouvoir des socialistes en 1981. Si la poésie qui pointait déjà dans les films de la période Ciné-Luttes s’y affirme — effet du retour à une écriture personnelle après les années collectives — la politique, l’indignation, la résistance par le cinéma à une société normatrice et conformiste, s’y déploient toujours. Une "poëlitique" pour reprendre l’expression de Bernard Lubat, généreuse, joueuse autant que noire et cruelle, pour peindre le monde.
Aujourd’hui Jean-Denis Bonan tourne plus que jamais, au moins autant qu’il peint ou dessine. Ses films circulent enfin. Et nous sommes très heureux d’ouvrir avec lui le cycle de projections et de rencontres qui vont accompagner les 20 ans de Sans Canal Fixe. »

Illustration : image extraite de L’école des fous