L’interdiction du site d’information germanophone, prononcée au nom de la loi sur les associations, a été accompagnée de plusieurs perquisitions effectuées par le LKA (GIGN allemand) chez les personnes suspectées de modérer le site, à Freiburg. Ces perquisitions ont pris pour cible quatre appartements ainsi que le centre autonome KTS, un espace d’activités politiques de Fribourg ouvert depuis 1994, dont toute l’infrastructure informatique a été saisie.
Barrikade.info, qui se situe lui-même dans la tradition des Indymedia, se solidarise avec Linksunten et les personnes touchées par cette vague de répression. L’interdiction frappe Linksunten, mais en réalité c’est toute la gauche radicale non parlementaire qui est visée. Linksunten était une plateforme d’échange centrale pour les mouvements sociaux autonomes dans l’espace germanophone. On y trouvait des communiqués, des analyses et des informations de différentes tendances anti-autoritaires. Tout comme sur Barrikade.info, chaqu’unE pouvait y publier du contenu. C’est à ce principe d’ouverture et d’anonymat que s’attaque le gouvernement allemand.
Plusieurs fois déjà des voix s’étaient élevées en Allemagne pour réclamer l’interdiction de Linksunten. Cette campagne a encore pris de l’ampleur après le succès des actions de protestation contre le G20 à Hambourg. Linksunten a été partie prenante de ces protestations et a pu, grâce à son ouverture et sa résonance, porter et rendre visible le contenu de ces protestations loin au-delà de son aire d’influence habituelle. Durant le seul mois de juillet, 3 millions d’internautes se sont rendus sur la plateforme. Linksunten a aidé beaucoup de personnes à s’organiser, à s’informer de manière indépendante et à échanger des idées à propos du contre-sommet. La visibilité des idées et analyses radicales est particulièrement importante dans une période où les conflits sociaux s’intensifient.
Après la contestation contre le G20, les politiques de toute couleurs, de la CDU (l’Union chrétienne-démocrate, le parti d’Angela Merkel) au SPD (le Parti social démocrate), n’ont cessés d’exiger des sanctions plus lourdes contre les manifestantEs, ainsi qu’une surveillance plus forte, notamment des plateformes de communication. Quarante années après « l’Automne allemand » [1], l’hystérie est de retour et avec elle une intensification de la répression. A Hambourg, les puissants ont été surpris par la colère grondant dans le ventre de la bête. Là-bas, la réaction s’est faite à coup d’unités spéciales, de fusils et de violence massive. Cela se poursuit avec l’interdiction d’Indymedia Linksunten, une attaque contre les infrastructures du mouvement de contestation.
L’interdiction s’ancre aussi dans la phase « chaude » du combat électoral allemand. Le ministre de l’intérieur De Maizière et la CDU cherchent a se mettre en avant au travers de leur engagement contre la gauche radicale. L’activisme du ministère de l’intérieur est aussi en lien avec la montée en influence de l’AFD (nouveau parti d’extrême droite). La CDU craint sûrement de perdre des électeurs et électrices sur son aile droite si elle ne se montre pas assez ferme.
Comment réagir face à cette interdiction ? La question reste ouverte. Linksunten a annoncé la réouverture prochaine du site. Ce qui sûr, c’est qu’Internet est un espace vaste et que des alternatives apparaîtront rapidement. Ce qui est également sûr, c’est que la colonisation de cet espace libre va continuer d’augmenter et que dans le futur nous serons plus fréquemment confrontés à des attaques étatiques.
Barrikade.info, tout comme d’autres projets similaire, restera également dans le futur un canal de communication ouvert et anonyme pour une critique et des actions autonomes. Il s’agit justement de saboter l’ordre existant et de prendre parti dans les conflits sociaux en cours.
Solidarité avec Linksunten ! Pour un internet Libre !
Illustration : Rasande Tyskar/CC BY-NC 2.0