Le discours sur l’excision doit changer

Actuellement en France, le discours sur l’excision oscille entre misogynie et paternalisme à l’égard des femmes noires. Et ce n’est pas la bonne méthode pour lutter contre cette pratique patriarcale violente. Amandine Gay a publié un excellent article sur le site Slate.fr, en voilà quelques extraits.

Cet article commence il y a près de dix ans, lors d’une conversation avec une camarade de classe :

« Je te l’avais pas dit ? T’es sûre ? Pourtant j’étais convaincue de t’en avoir parlé... Ben, voilà quoi, vacances au bled à huit ans, un après-midi mes parents disparaissent et là mes tantes me chopent et puis on m’a excisée quoi. »

Je reste pantoise et lui explique que si elle me l’avait dit, je m’en serais souvenue ! S’ensuit une conversation très pragmatique : coupée, mais coupée comment ? Et sa vie sexuelle ? Et les gynécos ? etc.

Elle finit par me demander si à l’occasion, je serais d’accord pour qu’on compare nos sexes car elle n’a jamais eu l’occasion de le faire avec une autre femme noire non-excisée. A la pause, dans les toilettes de la fac, nous comparons nos clitoris et nos lèvres. Je lui dis que d’après ce que je vois, l’exciseuse l’a ratée dans le bon sens du terme et je lui demande où elle en est niveau masturbation et si elle veut que je lui achète un vibromasseur parce que je ne sais pas trop quoi dire et que j’ai envie d’aider. [...] Cette histoire est sans doute la raison pour laquelle j’ai toujours été frappée par le traitement médiatique et institutionnel de l’excision en France.

[...] Il est important de préciser que critiquer de façon politique le discours répandu sur l’excision, en France, ne revient pas à soutenir l’excision elle-même, qui est incontestablement une des manifestations les plus visibles de la violence patriarcale.

S’il est fondamental d’oeuvrer à la disparition des mutilations sexuelles féminines, le discours paternaliste et culpabilisant ne semble pas être la stratégie la plus efficace : il génère une honte et un sentiment de culpabilité chez les femmes concernées et une crispation dans la communauté africaine.

[...] L’excision est l’une des thématiques de prédilection du discours médiatique misérabiliste sur les femmes noires. Pourtant, cette pratique ne concerne qu’une infime minorité : les femmes excisées sont 53.000 en France si l’on en croit l’INED, pour une population évaluée, en l’absence de statistiques ethniques, de 3 à 5 millions de Noir.e.s.

On peut à ce sujet établir un parallèle entre le traitement médiatique de l’excision et celui de la prostitution. Dans King Kong Théorie, Virginie Despentes :

« Les prostituées sont l’unique prolétariat dont la condition émeut autant la bourgeoisie »

On pourrait aisément soutenir de même que les excisées sont les uniques Noires dont la condition émeut autant la bourgeoisie.

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