C’est ainsi par exemple qu’en Loir-et-Cher, où le Directeur diocésain était à la fois un proche de Béatrice Bourges (la pasionaria des ultra-cathos du Printemps français) et l’un des porte-paroles de La Manif Pour Tous [2], l’évêque de Blois (Mgr Batut, dont la proximité avec les milieux traditionalistes avait fait polémique dans les presses française et italienne et jusqu’à la Chambre des députés) [3] vient de confier une nouvelle mission à la communauté Saint-Martin (CSM) pour « renforcer la pastorale scolaire » dans les écoles catholiques [4].
Particularité de la CSM : cette communauté traditionaliste dont un des principaux responsables, Don Louis Hervé Guiny, serait l’éminence grise de nombreux politiques très à droite comme Guillaume Peltier ou Patrick Buisson [5], est bien connue et est fort bien implantée localement. Elle avait encore il y a peu sa maison-mère à Candé-sur-Beuvron, près de Blois, avant de déménager à Evron (Mayenne) en 2014. La communauté se trouve en effet à la tête d’un joli patrimoine financier et immobilier (l’abbaye d’Evron aurait été acquise pour environ 3 millions d’euros) [6] grâce à ses généreux donateurs suisses (comme L’association des Amis de la Communauté Saint-Martin, qui a son siège à Fribourg) ou encore grâce aux possibilités offertes en France par la défiscalisation et la complaisance des autorités politiques, administratives et académiques (par déclaration à l’Inspection académique du Loir-et-Cher en date du 01/09/1993, les curés avaient eu la bonne idée de créer un « établissement privé d’enseignement supérieur de philosophie et de théologie » qui leur permettait de recevoir des dons ouvrant droit à avantages fiscaux pour former leurs séminaristes...) [7].
L’évêque de Blois n’avait donc pas à chercher bien loin pour trouver des recrues de choix pour s’occuper des écoles cathos — la CSM dispose déjà de plusieurs aumôneries et internats dans les écoles privées du département —, et il a ainsi tout naturellement décidé de faire appel à trois prêtres intégristes de la CSM qui s’étaient distingués par leur ardent prosélytisme contre la loi Taubira et le mariage pour tous ; ils avaient en effet réussi à susciter l’admiration des notables locaux et de leurs collègues curés lors des manifestations parisiennes pour lesquelles ils avaient affrété plusieurs cars en mobilisant leurs ouailles jusqu’au fin-fond des campagnes de la région (très rurale) de Montoire. [8]
Cet épisode glorieux avait permis localement de redorer le blason de la CSM qui avait été un peu terni, il faut l’admettre, par la mise en examen (et malgré la présomption d’innocence) d’un curé de la communauté pour le pillage de nombreux objets de cultes (calices, ciboires, ostensoirs, etc.) pour plusieurs dizaines de milliers d’euros dans quatorze églises de la paroisse ! [9]
Abandonnant donc ses ouailles campagnardes pour une plus haute mission évangélisatrice, le commando ensoutané récompensé par l’évêque prendra officiellement ses nouvelles fonctions en septembre 2016 pour veiller à la transmission de la bonne parole dans les établissements cathos du diocèse.