De Sao Paulo à Pékin, la tournée internationale des élus régionaux pour attirer les touristes

Pour promouvoir l’opération « 500 ans de RenaissanceS », les élus de la Région Centre-Val de Loire ont parcouru la planète. Une tournée qui tranche avec leur objectif affiché de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.

Sao Paulo, Rome, Berlin, Pékin, New-York, Moscou... Ce n’est pas l’itinéraire de la dernière tournée de Beyoncé, mais quelques-unes des étapes du tour du monde effectué par des élus régionaux pour promouvoir l’opération « 500 ans de RenaissanceS en Centre-Val de Loire ». Entre octobre 2018 et janvier 2019, élus et agents du Comité Régional du Tourisme (CRT) ont multiplié les déplacements, de la Corée du Sud à l’Espagne, dans le cadre d’une tournée intitulée « Viva da Vinci », afin de « faire rayonner le Centre Val de Loire et la France auprès des clientèles internationales ».

Salons d’affaires pour rencontrer des tour-opérateurs, soirées avec la presse, dégustations de vins, « cocktail networking »... Les élus — accompagnés à l’occasion par des acteurs privés — ont donné de leur personne pour faire « rayonner » la région Centre auprès d’une clientèle internationale. Et ils n’ont pas lésiné sur les moyens, même si les informations obtenues à ce sujet sont contradictoires.

Plus d’un million d’euros de dépenses de communication

D’après les informations obtenues auprès du CRT, le plan de communication consacré aux « 500 ans de la RenaissanceS » aurait coûté un total de 850 000 euros sur deux ans. Atout France, l’agence de développement touristique pilotée par l’État, aurait contribué à hauteur de 350 000 euros. Ce qui laisse tout de même un demi-million d’euros à la charge de la Région et des agences touristiques départementales, qui auraient collectivement participé à hauteur de 100 000 euros. Ces chiffres semblent pourtant sous-évalués, puisque le budget primitif de la Région pour l’année 2019 propose « d’inscrire 0,800 M€ pour les opérations de communication liées aux 500 ans de la Renaissance » [1]. Les dépenses de communication de la collectivité régionale pour cette opération ne s’élèveraient donc pas à 400 000 euros, mais à 800 000 euros ! Pour un coût total, incluant la participation d’Atout France, dépassant le million d’euros.

De l’argent public contre des « likes »

Outre la tournée « Viva da Vinci », ces dépenses de communication intègrent toutes sortes d’actions. La Région s’est par exemple payée une opération de publicité sur les rames du tramway de Milan. Elle prévoit également d’accueillir des « influenceurs » dans l’espoir d’obtenir des retombées sur différents supports : Youtube, Instagram, blogs, etc. Ce type d’opération consiste à payer les frais de transport, d’hébergement, de restauration, etc., de personnes dont la valeur est appréciée en fonction du nombre de personnes qui les suivent sur les réseaux sociaux. Dans l’espoir qu’elles daignent parler de leur hôte sur leurs supports de prédilection... Autre genre d’opération : un stand régional spécial Renaissance au Salon de l’Agriculture... [2]

Publicité sur le tram de Milan

Séduire la clientèle internationale et faire face à l’urgence climatique, des objectifs irréconciliables

Avant même la fin de la tournée Viva da Vinci, la Région Centre se lançait dans une autre opération de communication abondamment relayée par la presse locale : le lancement d’une « COP » régionale, soit une conférence sur le climat visant à mettre en œuvre des « actions concrètes » face à l’« urgence climatique ». L’ambition est louable, mais on peut se demander comment elle s’articule, dans l’esprit des élus régionaux, avec l’ambition de la tournée internationale « Viva da Vinci » visant à faire venir toujours plus de touristes internationaux en région Centre.

En effet, le tourisme représente déjà près de 10 % des émissions de gaz à effet de serre, d’après une étude publiée en 2018 [3], dont les auteurs préviennent : « Nous prévoyons que le tourisme constituera une part croissante des émissions de gaz à effet de serre ». Les objectifs affichés par la Région (attirer toujours plus de touristes internationaux d’une part, participer à la lutte contre le réchauffement climatique d’autre part) semblent donc parfaitement irréconciliables. Heureusement, on dépense des centaines de milliers d’euros en communication pour emballer tout ça.

Notes

[1Voir la page 94 du budget primitif pour l’exercice 2019 sur le site de la Région.