L’enfant d’Ingrid Berthet et d’Aly Diawara doit naitre dans quatre mois. Il a des droits que la préfète d’Indre et Loire choisit délibérément de violer. Notamment l’article 7 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant ratifiée en août 1990 par la France et qui garantit à tout enfant le droit « de connaître ses parents et d’être élevé par eux ».
Les justifications de la préfète — une entrée irrégulière en France du futur père et le non-respect (le seul !) de son obligation de pointer à la gendarmerie — sont dérisoires face au devenir d’un bébé que la représentante de l’État veut priver de son droit le plus cher, celui d’être aimé. De bien piètres justifications quand on sait qu’Aly ne s’est jamais fait connaître défavorablement, ni à Nazelles-Négron où il demeurait avec Ingrid avant d’être enfermé au CRA de Rennes, ni à Amboise où il était entraîneur bénévole de l’équipe senior du club de football.
La « solution » proposée le 31 décembre à Ingrid d’aller se marier en Guinée, de faire retranscrire le mariage en France et de solliciter un regroupement familial, est choquante et cynique quand on sait que la préfète a assorti son OQTF [1] d’une IRTF, une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.
S’indigner de tant d’inhumanité ne suffit plus. La décision est de nature politique et appelle une réponse citoyenne. Nommée par décret du président de la République, la préfète applique la politique de l’État dans le département : celle du rejet des réfugiés au mépris de leurs droits fondamentaux, et en même temps, celle qui trompe l’opinion publique en se présentant en rempart contre l’extrême droite, qui elle, les rejette en le revendiquant haut et fort. Avec le but identique de siphonner les voix dans le cadre d’élections présentées comme l’alpha et l’oméga de la démocratie.
L’élection de dictateurs élus parfois avec d’importantes majorités montre pourtant que le suffrage universel ne résume pas la démocratie, laquelle nécessite un partage et un contrôle des pouvoirs. Depuis cinquante ans, la constitution de la 5ème République permet la concentration des pouvoirs entre les mains du parti politique victorieux aux élections. Ce parti vainqueur, quelle que soit sa majorité, dispose de tous les leviers pour imposer sa loi et refuser d’entendre les personnes portant d’autres valeurs que les siennes.
S’impose dès lors à nous citoyens, ce droit qualifié d’« imprescriptible » par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 : « la résistance à l’oppression ».
Catherine Lison-Croze, avocate honoraire