C’est une note de service peu banale qui a été adressée au personnel hospitalier du CHRU de Tours le 15 janvier dernier. Le document, titré « Rappel de l’obligation de réserve de tous les agents du service public sur les réseaux sociaux et dans les médias », constitue en fait une tentative d’intimidation. On peut y lire :
Tous les agents publics sont tenus à l’obligation de réserve et de mesure dans l’expression écrite et orale de leurs opinions personnelles. Aussi, cette obligation s’applique de la même manière sur les blogs, les réseaux sociaux et dans les médias.
[...] Les agents doivent éviter toute manifestation d’opinion de nature à porter atteinte aux supérieurs hiérarchiques, à dévaloriser l’institution et à nuire à la considération du service public par les usagers. L’obligation de réserve constitue en ce sens une limite à la liberté d’opinion. Le non-respect de cette obligation de réserve est susceptible de constituer une faute disciplinaire.
Derrière ce « rappel », la direction générale du CHU menace en fait de sanction les agents qui oseraient témoigner de la réalité du travail dans les différents établissements hospitaliers de la métropole. Une réalité déjà dénoncée par les organisations syndicales du CHU, qui luttent contre les suppressions de postes et de lits à l’hôpital, en dénonçant leurs conséquences sur la qualité des soins et des conditions de travail. Comme le déclare un agent du CHU, sous couvert d’anonymat :
Déjà peu présents dans les manifestations dû notamment au « service minimum » auprès des usagers, les personnels hospitaliers sont une fois de plus réprimés… Continuer à se taire, c’est accepter ces conditions scandaleuses d’exercice de la profession.
La menace lancée par la direction du CHU est d’autant plus insidieuse qu’elle s’appuie sur une notion flou, « l’obligation de réserve », qui n’apparaît dans aucun texte et fait l’objet d’une appréciation au cas par cas par les juges administratifs. Il est ainsi possible de faire peur à tout le monde sans viser personne. Le message envoyé aux agents par la direction du CHRU est clair : « Soignez et fermez-la ».
Finalement, le réseau des CHU de France a tenté d’allumer un contre-feu en lançant d’autres mots d’ordres sur les réseaux sociaux : #FierDeMonHopital, #JaimeMonCHU ou #JaimeMonHopitalPublic. Une opération de communication qui cache mal les coups portés à l’hôpital public et ses agents.