Municipales : retour sur l’inauguration du QG de campagne de la liste "Tour(s) ensemble"

Le jeudi 16 janvier, dès 18 heures, amis et soutiens de "Serge" se pressaient sur le trottoir pour l’inauguration de la permanence de la liste "Tou(r)s ensemble". Selon les organisateurs, l’événement a réuni environ 500 personnes, la plupart venues en famille, et qui se félicitaient mutuellement de n’avoir "plus que la place Jean-Jaurès à traverser" pour (re) prendre la mairie de Tours.

Le rendez-vous était fixé à 18 heures 30, mais les participants se pressaient dès 18 heures devant le QG de campagne. Sur le trottoir, les salutations sont particulièrement chaleureuses : on se présente les épouses, les enfants, les voisins ; c’est un petit monde de pantalons à plis et de tailleurs élégants qui s’auto-complimente et qui se félicite déjà du succès de la campagne. La grande majorité des participants arbore les écharpes et les badges bleus de la campagne. Certains, examinant la foule, se demandent s’ils vont pouvoir pénétrer à l’intérieur du bâtiment...

L’entrée du bal des débutantes

L’argent, le nerf de la « guerre »

A 18 heures 30 précises, les portes s’ouvrent au public. Dès l’entrée, des hôtesses d’accueil requièrent, munies d’urnes, un soutien financier : « pour Serge » peut-on lire sur les boîtes en cartons décorées avec les restes des papiers cadeaux de Noël. Il est indiqué oralement que la somme minimum demandée pour l’entrée est de 3 €, mais nombreuses seront les coupures de 20 ou 50 € glissées par les participants. Les sollicitations pécuniaires ne s’arrêtent d’ailleurs pas là : au fond de la première salle, d’autres hôtesses proposent au public d’acheter des badges pour la modique somme de 5 €, tandis qu’une douane volante sévit à l’extérieur en distribuant des formulaires de soutien et en incitant les participants à devenir des « membres actifs ».

Cet affichage de l’argent est assumé par la tête de liste. « On ne gagne pas de guerre sans armes » déclare haut et fort Thibaut Coulon. L’argent est bien le nerf de la guerre et il servira la « propagande » nécessaire à la campagne. L’accent est porté sur les avantages fiscaux liés aux dons : « Quand vous donnez 100 €, l’État vous en rembourse 66 ! Vous ne déboursez en réalité que 34 € ! Dans ces conditions, nous vous conseillons de donner tout de suite 300 € ! » Le public éclate de rire.

L’objectif commun est clairement énoncé par Philippe Briand, très en forme ce soir-là, et qui fait office de chauffeur de salle : il s’agit de « trucider les verts et les rouges ». Les sourires s’affichent sur les visages, on entend des gloussements et des rires étouffés dans la salle.

Barbarie Socialiste

Les discours des différents orateurs commencent par la dénonciation de l’incompétence des socialistes à la mairie de Tours comme à l’Élysée. Philippe Briand s’amuse du cas de François Hollande. L’actualité aidant, c’est sur un ton sarcastique qu’un nouvel étalage de l’affaire Hollande-Gayet est proposé aux auditeurs avec un assaisonnement final qui passerait (presque) pour un plaidoyer féministe :

« Il y a quand même, derrière, on en pense ce que l’on veut, on l’aime ou on ne l’aime pas, mais il y a quand même l’humiliation d’une femme, Madame Trierweiler, et c’est quand même quelque part quelque chose qui doit tous nous marquer au titre du respect humain parce que, qui que l’on soit où que l’on soit, on ne mérite quand même pas des fins publiques comme ça. » [1].

Briand réagit ensuite à la conférence de presse donnée par François Hollande dans laquelle il s’est (enfin) déclaré social-démocrate pour rétorquer sèchement : « Non monsieur, on n’est pas un social-démocrate quand on est l’otage des communistes et des écologistes ! » Nouveaux applaudissements ; certains s’emballent déjà : « bravo, bravo ! ». Il faut dire que Briand se livre à un grand show : couplet sur les soldats français envoyés en Afrique et « qui ne reviendront pas », imitation de Jean Royer, évocation des « combats difficiles » menés par la droite après 1981... La foule est aux anges.

C’est enfin le moment pour Serge Babary de prendre la parole. Ce dernier promet de restaurer l’image et le rayonnement de Tours afin de « lui redonner la place qu’elle mérite dans le classement des grandes métropoles ». Il promet d’être « maire à 100% », attaquant ainsi Jean Germain qu’il qualifie de « maire TGV », mais se gardant bien de rappeler que son prédécesseur Jean Royer, « ce grand homme », mentionné à plusieurs reprises, était, lui aussi, un cumulard de mandats.

L’aspirant-maire insiste sur l’intérêt qui doit être porté aux quartiers populaires. Il évoque par exemple le cas des Rives du Cher, « le plus grand chantier d’urbanisme d’Europe de l’époque » et regrette le désengagement politique de ses habitants, et en particulier des jeunes à qui la mairie de Tours ne prête aucune attention, pas même pour remplacer une ampoule défectueuse sur un terrain de basket. Fin politologue, Babary explique doctement à l’assemblée que c’est l’absence d’ampoule qui explique que les jeunes se détournent de la politique...

Face au « mépris » des élus actuels, il conviendrait, selon Babary, d’instaurer un dialogue avec les habitants, notamment afin d’éviter le développement d’une épidémie Front National. Il met donc en garde son électorat :

« Si vous votez FN, vous maintenez les socialo-communistes à la mairie ! »

Le « Bourgeoisisme » [2] tourangeau

Entre les « réunions d’appartements » (dont on peut supposer qu’elles ne se tiendront ni au Sanitas ni sur les Rives du Cher) et la prise d’assaut des marchés des Halles ou de Rabelais, on est en droit de se demander quelle sorte de dialogue pourra être renoué avec les habitants de ces « quartiers populaires ». D’autant que Babary entretient une distinction systématique entre « ces gens-là » et son auditoire. Le discours est symptomatique d’une droite désireuse de laisser à d’autres les propos xénophobes peu flatteurs, mais qui a développé une « allergie aux HLM [qui] tient plus à l’ostracisme de classe qu’à la couleur de la peau et à l’identité nationale » [3].

Pendant le discours, la foule devient plus clairsemenée, et les applaudissements se font moins nourris. C’est que la parole est hésitante, les idées sont confuses, et le ton manque d’allant... Un malaise oblige même l’apprenti-tribun à s’interrompre et à superviser l’évacuation.

Signalétique salvatrice

L’inauguration du QG était aussi l’occasion pour la liste Tour(s) ensemble de présenter ses vœux aux tourangeaux. Sachez que les membres de la liste vous souhaitent plein de bonnes choses, mais à compter du 31 mars seulement. D’ici là, tout peut se dégrader, ça les arrangerait plutôt. La cérémonie se termine par une reprise cacophonique et poussive de La Marseillaise.

Nous ne sommes pas restés pour le verre de l’amitié...

Tom et Gabriela

Notes

[2Néologisme proposé par le couple de sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon qu’ils estiment « adapté à la guerre idéologique qui ne cesse de dénoncer avec le populisme un peuple qui serait flatté par certains politiciens, alors qu’il ne mériterait pas tant d’honneurs. »

[3Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon, La violence des riches. Chronique d’une immense casse sociale, Zones, 2013