Depuis le début du confinement mis en place par le gouvernement, le quartier des Halles, à Tours, est quasiment désert. Seul le tabac à l’angle de la rue Bretonneau semble encore ouvert. Mais en tournant vers la place du Monstre, on se rend compte qu’un groupe de livreurs à vélo fait la queue devant l’espace de livraison du restaurant McDonald’s qui s’est installé là il y a quelques années. Première réaction en découvrant la scène : faut vraiment être un connard pour se faire livrer un Big Mac en pleine pandémie. Deuxième réaction : qu’en est-il de la sécurité des salarié-es au sein du restaurant ? Comment respecter les gestes barrières dans les cuisines exiguës d’un McDo ?
L’article de Médiapart, « Des gens meurent et nous, chez McDonald’s, on vend des nuggets », apporte des réponses édifiantes. Pas de masques, pas de gants, pas de gel hydroalcoolique, des distances de sécurité impossibles à respecter, et surtout de lourdes pressions de l’encadrement sur les salarié-es envoyé-es en première ligne. Extraits.
Dans les jours qui suivent l’annonce du premier ministre, aucune protection n’est mise en place dans le restaurant [des Deux-Lions], affirme Lucie. « La salle était fermée mais le drive et les commandes en livraison continuaient, sans aucune protection, raconte-t-elle. Pas de gants, pas de gel, pas de masque, rien. »
« Ma patronne a vu que je répondais sur un groupe Facebook qui regroupe des équipiers de McDonald’s, et j’ai écrit qu’on travaillait toujours et qu’à l’époque, les seuls masques que l’on avait étaient faits avec du Sopalin. J’ai eu des remontrances de ma patronne et elle m’a laissé le choix : soit je viens et j’arrête de me plaindre, soit je m’en vais et je suis licenciée pour abandon de poste. »
La jeune femme ne se sent pas en sécurité et le dit à ses responsables. Mais face à ses plaintes, la seule réponse est, invariablement, la menace de licenciement.
Au début de l’épidémie, les salariés du restaurant des Deux-Lions étaient moqués par leurs supérieurs quand ils demandaient des masques. Ceux qui ont été assez courageux pour en exiger ont finalement obtenus des « cache-barbe », utilisés toute l’année pour ne pas retrouver un poil dans un burger. « Les salariés doivent tous porter un masque, disponible en restaurant, [...] alors que les recommandations sanitaires ne l’intègrent pas », déclare Bernard Simmenauer. Une affirmation contredite par les témoignages de salariés que nous avons interrogés.
Quand certains d’entre eux ont tenté d’exercer leur droit de retrait, ils ont été la cible de méthodes « humiliantes ». Le 17 mars, quand ont rouvert les restaurants de Bernard Simmenauer, sept équipiers sur les 70 du restaurant des Deux-Lions ont déposé leurs droit de retrait. Mais quinze en ont été dissuadés par la direction. [...] Au restaurant de Châtellerault, aussi exploité par Bernard Simmenauer, les salariés se sont également vu rétorquer que “le droit de retrait n’existait pas dans leur entreprise”.
Alors que McDonald’s a fermé ses restaurants en Belgique, au Royaume-Uni ou en Espagne, que la plupart des restaurants en France sont fermés, Tours se distingue par les pratiques dégueulasses mises en oeuvre par Simmenauer. Qui se fout apparemment de mettre en danger salarié-es, livreur-euses et client-es tant qu’il peut continuer à faire tourner son business.