Une petite définition s’impose. Le terme de lean vient de l’anglais et signifie : « sans gras », « dégraissé ». Cette pratique vient du Japon et a été mise en place par l’entreprise Toyota. Elle a pour objet la recherche de la performance. En clair, on calcule au plus juste le temps nécessaire à une tâche et on supprime tout ce qui ne rapporte pas à l’entreprise, notamment les temps de pause, les temps de discussion, les temps de trajets… Faire toujours plus, plus vite et mieux.
C’est ce lean management qui a été mis en place au sein de certaines grandes entreprises françaises telle que PSA Peugeot, Renault, La Poste, Orange. On voit le désastre que cette technique managériale a engendré chez Orange, avec conjointement une baisse d’effectifs et une augmentation de la charge de travail, des burn-out et surtout une vague massive de suicides au sein du groupe.
Et au CHU ça implique quoi ?
- Baisse des effectifs avec le recours à l’autoremplacement (Whoog) [2], la suppression des postes de contractuels-les ; le non remplacement des départs à la retraite ; la suppression des mensualités d’été…
- Mutualisation du personnel : polyvalence du personnel inter service, inter pôle.
- Augmentation du ratio patient-e-soignant-e : non respect des quotas entrainant un accroissement de la charge de travail par agent.
Les conséquences pour les soignant-es ?
- Augmentation du stress, de la fatigue, des troubles musculo-squelettiques, des risques psycho-sociaux, tensions entre collègues.
- Augmentation des risques d’erreurs, des événements indésirables.
- Augmentation des tâches administratives, des tâches de traçabilité.
- Chronométrage des soins techniques, diminution du temps de relève.
Les conséquences pour les patients ?
- Mise en place de protocole standard pour patient standard : pas de place pour l’imprévu.
- Perte de la singularité du patient, on déshumanise.
- Sabordage du soin relationnel : on sacrifice le temps d’écoute (qui ne rapporte pas) au profit du soin technique.
- Des durées de séjours diminuées au maximum : on renvoie les patients chez eux le plus vite possible, à charge de leur famille de les assister.
En résumé, le lean management, c’est la perte de l’essence même du soin. On traite la pathologie mais pas les patient-es, c’est de la maltraitance institutionnelle. Les soignant-es ont choisi ce métier pour ses valeurs humaines, mais on les ramène à de simples techniciens, que l’on fragilise au profit des bénéfices, qu’on maltraite en détruisant leurs conditions de travail. Ce qui s’est passé chez Orange n’est-il pas suffisant ???
Combien faudra-t-il de suicides pour que nos directions arrêtent de mener ces politiques managériales ? Pour SUD, le lean management est incompatible par nature avec le fonctionnement d’un hôpital et le rôle du service public de la santé. Nous ne sommes pas là pour mesurer notre compétitivité et améliorer nos cadences et notre rentabilité.
Déjà nos collègues en France, dans certains établissements qui ont été les premier-es sinistré-es pâtissent de ce management dangereux. À Lyon par exemple, les organisations syndicales ont fait inscrire le lean management dans les risques psycho-sociaux, par rapport à la charge mentale qu’il fait peser sur les agents.
Et parce que le lean management est au cœur du projet des restructurations voulues par notre directrice, parce qu’il doit être un des outils principaux censé nous imposer les suppressions de postes, de lits, et les futurs plans d’économies, ne laissons pas faire ! Réagissons toutes et tous ensemble !!!