Le grignotement des terres agricoles, de Notre-Dame-des-Landes à Loches

Le Comité Lochois-Sud Touraine de Lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, interpellé par la disparition accélérée des terres agricoles, a commencé à se pencher sur la situation lochoise. Histoire de comprendre ce qui pourrait se jouer dans les années qui viennent, et anticiper les réactions en cas de projets inutiles et imposés.

Une des motivations majeures du Comité Lochois-Sud Touraine de Lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est la sauvegarde des terres agricoles. La disparition accélérée des surfaces de production en France [1], dans un contexte de changement climatique et de finitude des ressources fossiles, nous semble être un signe alarmant du manque de résilience de nos territoires.

Cette motivation nous a amené à nous intéresser au Plan Local d’Urbanisme de Loches [2]. En effet, l’une des richesses du Sud Touraine est la présence encore notable d’une agriculture diversifiée (même si elle tend à s’uniformiser au profit des seules céréales), et il nous semble crucial de la maintenir, voir de la développer dans le sens d’une agriculture locale, respectueuse de son environnement, de la santé humaine et des générations futures. Ce Plan Local d’Urbanisme de Loches nous pose aujourd’hui plusieurs questions.

Les projets existants ou en cours

Une nouvelle gendarmerie va être construite sur des terres actuellement cultivées : ne serait-il pas plus judicieux d’aider à l’amélioration de l’existant, ou de déménager ailleurs que sur des terres agricoles ?

Autour du magasin Super U, des travaux importants vont aboutir à la construction, à l’Est et à l’ouest de l’existant, de quinze locaux commerciaux supplémentaires. Ces constructions se font au détriment de terres cultivées, et potentiellement, au détriment d’une vie commerçante de centre ville [3].
La zone industrielle quant à elle est agrandie de 5 hectares, afin d’anticiper une éventuelle arrivée d’entreprises nécessiteuses d’une telle surface pour bien sûr, selon l’argumentation officielle, offrir une centaine d’emplois hypothétiques sur le Lochois.

Terres devant accueillir la nouvelle gendarmerie

Les zones du PLU classées comme zones à urbaniser

Les PLU sont en général constitué de zones agricoles, de zones naturelles et de zones urbanisées. Ces PLU sont révisés régulièrement, révision qui amène notamment à modifier des zones naturelles ou agricoles en zones « à urbaniser ». Rarement l’inverse. A noter que dans la « loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové » (dite loi Alur), les zones classées 2AU (à urbaniser) qui n’auront fait l’objet d’aucun aménagement ou d’acquisition foncière au bout de 9 ans seront considérées comme zones naturelles ou agricoles (zones N ou A), donc non urbanisables.

Les parcelles agricoles de la forêt de Fretay, du Marchais Lecomte, à la sortie de Loches sur la route de Ligueil, sont classées à destination industrielle ou commerciale. Si un projet industriel ou commercial s’installait à cet endroit, c’est une troisième entrée de ville qui serait sacrifiée en terme paysager et agricole. De plus, cela pourrait faciliter le classement futur des parcelles situées entre la ville et cette zone, comme zones à construire.

Les parcelles agricoles autour du Château d’eau sont classées à destination résidentielles. En plus de l’emprise sur des terres agricoles, de tels projets questionnent au vu des nombreuses caves qui fragilisent le sous-sol.

La zone visée par les constructions autour du Super U

Enfin, des parcelles agricoles au nord de la route menant à Ferrière-sur-Beaulieu, entourée de zones naturelles à l’est, au nord et à l’ouest, sont classées à destination résidentielle. Ici aussi, construire sur ces parcelles induirait la diminution des terres agricoles du Lochois, mais rendrait aussi plus aisée le classement en zones à urbaniser des parcelles naturelles situées tout autour.

Poursuite de l’étalement urbain

L’ensemble de ces projets en cours et de ces « zones à urbaniser » présentent pour nous le défaut de poursuivre l’étalement urbain (synonyme d’accaparement de terres agricoles et naturelles au profit de la ville). Si le changement de destination de terrain peut s’avérer nécessaire pour faire face à des changements dans la structure démographique de la population [4], les terres agricoles sont trop systématiquement vues comme une simple réserve foncière.

Une alternative serait de réfléchir une politique urbaine, en privilégiant systématiquement le maintien de ces terres, vues comme réserves de biodiversité, paysages à sauvegarder, lieu de productions vivrières locales, pour assurer l’avenir des générations futures.

Face aux enjeux climatiques et écologiques actuels, il nous semble nécessaire de mettre en place une gestion ambitieuse de la question de l’urbanisme des villes basée sur :

  • Une participation réelle des habitants à la définition des priorités en termes d’urbanisation, au delà des enquêtes publiques, par la mise en place de lieu d’élaboration collective où les habitants peuvent se former et définir les priorités pour leur ville.
  • La prise en compte des enjeux agricoles, environnementaux, climatiques, énergétiques, sociaux et économiques dans leur diversité et leur importance respective pour les générations futures.

Le Comité Lochois-Sud Touraine de Lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes

Notes

[1L’équivalent d’un département en terres agricoles disparaît tous les 7 ans contre 1 tous les 10 ans au début des années 2000. L’artificialisation a augmenté de 40 % les 20 dernières années, soit 4 fois plus vite que la population. C’est une des conséquences les plus visibles d’un développement urbain non maitrisé, fortement consommateur d’espace.

[2Tous les PLU ou autres documents d’urbanisme sont en consultation libre dans les mairies. Il ne faut pas hésiter à les demander.

[3La démarche de la Communauté de Communes « Loches Développement » de réhabilitation d’anciens locaux industriels en locaux artisanaux et commerciaux montre qu’une autre logique est possible.

[4D’après l’INSSE, la population Lochoise est quasi stable depuis 1975 : 6 738 habitants en 1975 pour 6507 habitants en 2010 et 6455 en 2011). Il faudrait étudier la réalité des phénomènes de décohabitation, la situation des logements vacants, etc.