Le film de Denis Robert "Cavanna, jusqu’à l’ultime seconde, j’écrirai" projeté aux Studios

Du 5 au 11 Août, le film de Denis Robert est sur les écrans du Studio à Tours. Ce documentaire est inespéré.

Siné, Wolinsky, Choron, et d’autres sont convoqués pour évoquer leur métier, leur passion, avec des moments d’humour sordides, de la tendresse, des coups de gueules. Charlie Hebdo et Hara Kiri n’avaient ni Dieu ni Maître, ni publicitaire, ni protecteurs financiers, ni business plan, mais des procès en pagailles, des emmerdements à foison. La seule fortune de ces journaux fut l’insolence et le talent des lanceurs d’alerte de l’époque.

L’époque parlons en, Hara Kiri paraît en 1960 alors que la guerre d’Algérie s’enlise, le pouvoir gaulliste censure, cogne tout ce qui est bronzé et assassine les manifestants. François Cavanna et Georges Bernier (Professeur Choron) partent en guerre contre la connerie et prennent le parti de provoquer. Autour d’eux une équipe se crée, Gébé, Siné, Cabu, Wolinsky, Defeil de Ton, Roland Toppor, plus tard Reiser. Rien ne les arrête, Hara Kiri est interdit en 1961, en 1966, en 1967 c’est le dépôt de bilan. Le journal revient en 1969, « l’Hebdo Hara Kiri ».

Il faut lire, « Bête et méchant » de Cavanna, qui raconte l’incroyable épopée. Cabu est démobilisé de la guerre d’Algérie sa plume et ses fusains seront anti militaristes, de ses souvenirs naîtra plus tard l’adjudant Kronenbourg. Siné égal à lui même vomit l’ordre et la nation, Wolinsky et Reiser dessine le monde avec cynisme et volupté provocatrice. Choron ne perd pas un moment pour être au dessus de la mêlée. Cavanna, écrit, bien sûr, c’est un régal de lucidité. Lire Cavanna c’est faire le plein de tendresse, de coup de gueule. Cet homme, titi parisien, rital par son père, grandit dans la pauvreté des quartiers populaires, il dévore les livres de l’armoire bibliothèque de l’école, emprunte par brassée ceux de la bibliothèque municipale de Nogent. Il sera envoyé au STO par l’État pétainiste, il reviendra meurtri dans le flot des déportés. Jamais, jamais il n’écrira par vengeance, ou comme un vétéran, cet homme a un amour de l’écriture, une passion, une rage d’écrire. Combattant la connerie humaine, Cavanna dessinera, puis écrira durant 60 ans.

Tout ce beau monde est associé à la rédaction en chef, qui est donc collégiale, tout le monde peut parler, on ne craint rien, le pire est le bienvenu. . Les propositions du collectif de rédaction sont provocantes à souhait, jusqu’au 16 Novembre 1970 où pour 1,50 franc, la mort du Général De Gaulle est traitée en fait divers :

Bal Tragique à Collombey, 1 mort

Le pouvoir ne rigole plus, L’Hebdo Hara Kiri est interdit à l’affichage et à la vente au mineurs, en fait, il ne peut plus être vendu.
Une semaine après, Charlie Hebdo est né. La guerre contre la connerie continue de plus belle, de belles années de lecture en perspective. Les unes sont de plus en plus délirantes, « Bokassa a bouffé le petit Jésus ! », « Crise du Pétrole, Giscard vend sa femme aux Émirs » etc, etc.

A l’heure où les empires de presse sont à la botte des marchands d’armes, des milliardaires, à l’heure où les quotidiens régionaux cirent les pompes des édiles, faites vous plaisir ! Allez voir, entendre ceux qui ont écrit leur rêves, leur rage pour en faire un journal.
1h30 de rêves ou de souvenirs, y en a pour tous les âges, prenez votre place !