Chronique d’une année scolaire : l’heure du bilan

Nous voici au dernier jour d’école, ce soir les élèves et leurs enseignants partiront pour quelques semaines de congés vers d’autres horizons. Voici aussi venue l’heure du bilan et la préparation de la rentrée. Au menu : prime au mérite, classes inégalitaires, manque de moyens, rythmes non uniformes et dictées quotidiennes.

Une casse systématique de l’Éducation nationale

Cette année scolaire aura été marquée par de nombreuses mesures visant à casser l’idée d’une école publique et nationale.

Premier constat : la réforme des rythmes scolaires initiée par V. Peillon, qui officialisait un rythme à 4,5 jours, avec l’appui des scientifiques, est réduite à un choix des communes. En Indre-et-Loire, 53 communes conservent ce rythme, les autres, plus de 400, recommencent à 4 jours.

Deuxième constat : le ministère a mis en place sa mesure-phare, le dédoublement des CP et des CE1 des écoles classées en Réseau d’Éducation Prioritaire. Ces classes sont donc à effectifs réduits, de 12 à 15 élèves. Dans une même commune, selon le classement de l’école — donc, en schématisant, selon le quartier dans lequel elle est implantée —, une école peut avoir un CP à 12 ou à 27. Ce dédoublement se fait de plus en enlevant des postes de remplaçants, et c’est bien sûr aux communes que revient le coût de réaménagement des locaux.

Des nouveaux programmes pour cet été

L’été sera consacré à la découverte des nouveaux programmes. Attendus pour le 12 juillet, ils permettront d’affiner les programmes existants, en rappelant les compétences essentielles à viser. A l’écoute des discours de Blanquer, qui ne cesse de rappeler que réintroduire la dictée et le calcul mental est une nécessité, on imagine déjà leur teneur. Ce n’est pas tant le fond que le ministre compte changer mais la forme. Un focus sur le fondamental, le retour des exercices mécaniques, qui ont fait leur preuve. Et surtout un éloignement du sens, ou comment faire des singes savants plutôt que de futurs citoyens éclairés.

Une prime au mérite : la nouveauté de la rentrée

Cette prime d’un montant variable et encore non fixé s’ajoutera à l’indemnité distribuée aux enseignants de Réseau d’éducation prioritaire. L’idée du ministre est de créer « la possibilité d’un adossement d’une partie de cette indemnité aux progrès des élèves et à l’accomplissement du projet d’école et d’établissement qui y contribue ». En clair, plus les élèves ont de bonnes compétences (celles du socle commun), plus les enseignants seront payés. De quoi assurer des évaluations à outrance, et une notation indulgente. Mais qu’importe, car le ministre pourra se glorifier des progrès des élèves en difficultés. Quant au grand nombre d’écoles sorties des dispositifs des réseaux d’éducation prioritaire ces dernières années, sous couvert d’économies budgétaires, elles pourront continuer à ne pas faire progresser leurs élèves.

Une formation des enseignants au rabais

Les professeurs des écoles ont droit à 18 heures de formation durant l’année scolaire. Déclinées en temps de 3 heures, le mercredi après-midi (parce que certaines écoles ont encore classe le mercredi matin), ces formations étaient consacrées aux différents domaines d’apprentissages ou à des spécificités pédagogiques (accueil d’enfants non francophones, gestion du handicap...) ou encore à des ouvertures culturelles en lien avec les partenaires locaux (musées, monuments, centres de ressources...). L’année prochaine, les parcours de formation sont imposés.

Neuf heures seront consacrées à la maitrise de la langue française, et neuf heures aux mathématiques. Fondamental, dirait le ministre. Les enseignants peuvent dire adieu au projet culturel, à l’ouverture à l’altérité, et même à la curiosité pédagogique. Et aux partenaires culturels et artistiques. Sauf, bien sûr, pour les plus motivés, qui participeront à des formations sur leur temps personnel. Peut-être le ministre envisage-t-il aussi une prime pour ceux-là ?

L’année s’achève, les enseignants vont quitter leurs élèves. Et ils seront de nouveau là, en septembre, avec l’espoir chevillé au corps que tous ces enfants peuvent réussir, que tous sont capables, et que les réformes et les primes ne changeront rien à ces instants de vivre ensemble qu’ils ont partagé tout au long d’une année scolaire.

Déca