8 février 1962 : un syndicaliste d’Amboise parmi les militants tués au métro Charonne

Le 8 février 1962, des milliers de Parisiennes et Parisiens manifestent contre la guerre en Algérie et les attentats commis par l’Organisation de l’armée secrète (OAS) [1]. Huit personnes meurent ce soir-là, victimes de la répression policière. Parmi elles, Édouard Lemarchand, militant communiste et syndicaliste d’Amboise.

La manifestation avait été interdite par les autorités, qui avaient mobilisé 2 845 CRS, gendarmes mobiles et policiers. C’est boulevard Voltaire et rue de Charonne que la répression sera la plus violente. Alors que les organisateurs donnent le signal de dispersion, les forces de l’ordre, commandées par le Commissaire Yser, chargent le cortège.

Les premières cibles des forces de l’ordre sont des élus communistes, frappés à la tête. Puis, c’est au tour des manifestants qui, portés par la foule, trébuchent dans les escaliers du métro Charonne et s’entassent les uns sur les autres. Au lieu d’aider les gens qui suffoquent, les policiers les frappent, les insultent, et n’hésitent pas à jeter sur eux les grilles d’acier qu’ils trouvent au pied des arbres, ou encore des grilles d’aération.

Le bilan est lourd : neuf morts. Huit d’entre eux sont morts par étouffement, un des suites de blessures à la tête. Leurs noms : Fanny Dewerpe, Anne-Claude Godeau, Suzanne Martorell, Daniel Fery, Hippolyte Pina, Jean-Pierre Bernard, Raymond Witgens, Maurice Pochard (décédé le 20 avril 62 suite à ses blessures) et Édouard Lemarchand. Tous étaient militants de la CGT, huit étaient communistes.

Édouard Lemarchand était né en 1921 à Amboise. Il était l’un des responsables de la section locale du PCF, qu’il avait rejoint après la guerre. Il avait quitté l’Indre-et-Loire depuis un an, pour travailler au journal L’Humanité, lorsqu’il a été assassiné par la police.

Les suites du 8 février en Indre-et-Loire

Le 11 février se tiennent quatre meetings à Tours, Loches, Bléré et Chinon. La participation est très forte. Vingt comités antifascistes se constituent dans le département. Dans le cadre d’une journée d’action pour la défense des libertés, une manifestation rassemble mille enseignants et étudiants à Tours.

De multiples débrayages contre le fascisme et pour la paix se déroulent dans la semaine du 11 au 18 février. Le 13 février, plus de 10 000 travailleurs tourangeaux cessent le travail en riposte aux brutalités policières et à la mort d’Édouard Lemarchand. 3 000 manifestants se rassemblent dans la cour de la Bourse du Travail à Tours à 18h30.

La veille, à l’appel du Parti socialiste, soutenu par toutes les organisations syndicales du département, 2 000 personnes s’étaient rassemblées devant l’hôtel de ville de Tours, à la mémoire des victimes de la répression.

Le 16 février, 5 000 personnes assistent à Amboise aux obsèques d’Édouard Lemarchand.

Le 19 mars, le cessez-le-feu est proclamé en Algérie, suite aux négociations entre le gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA) et le gouvernement français.

Le 8 avril a lieu le référendum pour approuver les accords d’Evian assurant l’indépendance de l’Algérie. La population tourangelle dit massivement « oui » à la paix : 135 436 votes « oui », 18 394 « non ».

P.-S.

Sources :
La CGT en Indre-et-Loire, VO Editions
Site internet de la section de Montlouis du PCF

Notes

[1Organisation politico-militaire clandestine luttant pour la défense de la présence française en Algérie.