De nombreux thèmes ont été abordés au gré des échanges et des interventions. Nous proposons d’en donner ici un aperçu.
La montée du poujadisme dans les années 1950
Une intervention de l’Institut d’histoire sociale a permis d’effectuer un retour historique sur ce mouvement, mais aussi de percevoir les liens que certaines personnalités politiques d’extrême-droite comme Jean-Marie Le Pen ont pu entretenir avec cet épisode du populisme à la française. Le mélange d’idées colonialistes, nationalistes, de sauvegarde de la famille, anti-politiciennes et antipartis qui caractérisait le mouvement lancé par Pierre Poujade ne semble pas toujours très éloigné de certains discours actuels. Les mouvements nauséabonds qui reprennent aujourd’hui les mêmes inspirations perpétuant la présence dans la société française de mouvements politiques corporatistes à tendance réactionnaire.
Municipalités d’extrême-droite
Le documentaire Mains brunes sur la ville [1] a servi de base à la réflexion des participants à la formation. Centré sur les municipalités d’Orange et de Bollène (Vaucluse), ce documentaire montre quelle gestion de la ville est opérée par des maires frontistes. Ces deux mairies sont dirigées par les époux Bompard, Jacques à Orange, Marie-Claude à Bollène, membres de la Ligue du Sud, formation politique issue du Front national. Le bilan de leur action politique est accablant. Les associations et les structures intervenant dans les communautés immigrées ont vu leurs subventions municipales systématiquement supprimées, au profit notamment d’une politique culturelle du « thé dansant ». L’insécurité, marronnier de l’extrême droite, sert de prétexte à l’attribution de moyens impressionnants à la police municipale. Autre exemple : les bus reliant les « cités » de la périphérie au centre-ville sont supprimés pendant l’été. Nul doute que cette mesure exemplaire évitera aux touristes d’être « menacés » par des jeunes issus des quartiers. Dernière ironie, alors que le Front national et ses alliés se sont récemment faits défenseurs de la « laïcité » face à un « islamisme rampant », la bonne ville de Bollène s’est vue consacrée au Sacré Cœur de Jésus !
Le Front national
En compagnie de militants VISA [2], le problème du Front national en lui-même a également été abordé. Après avoir rappelé l’histoire de ce parti et de ses stratégies, les intervenants ont décrypté le programme du FN. Dès lors la posture sociale, proche des ouvriers et travailleurs, arborée par le FN pour tirer parti d’une situation de crise économique est sérieusement mise à mal. Le programme du FN sur les retraites, l’emploi, les salaires, le temps de travail, le droit du travail et les syndicats est purement antisocial et particulièrement réactionnaire. Le FN des élections municipales à venir reste fidèle à lui-même, malgré un vernis prétendument social : plus de sécuritaire, plus de vidéosurveillance, plus de forces de police, la fin des dépenses sociales ou culturelles [3].
Echange de pratiques
La formation s’est conclue par un temps d’échange autour des diverses pratiques qui peuvent être mises en place pour mieux comprendre et dénoncer les discours à tendance fascisante auxquels nous sommes confrontés sur nos lieux de travail. Comment réagir lorsque des collègues relaient des « blagues » d’un « humoriste » comme Dieudonné, [4] acoquiné avec Alain Soral et J.-M. Le Pen dans la production de discours antisémites et fascistes ? Les solutions résident peut-être dans de « vieilles recettes » du syndicalisme : organiser la sociabilité et l’entraide. Car si le débat d’idées est indispensable, c’est encore la rencontre et la découverte de l’autre qui sont les meilleures armes contre les stéréotypes et la peur. Le syndicat CGT de la construction d’Indre-et-Loire, qui milite dans un secteur d’activité en proie à des stéréotypes racistes récurrents, a montré que, faute de réflexion et d’échange, le racisme et la xénophobie peuvent pénétrer au sein même du syndicat. L’instauration de permanences conviviales le samedi et de réunions communes fréquentes ont permis à des salariés d’origines diverses de se rencontrer et de démonter des idées issues de l’individualisme libéral.
L’organisation de formations intersyndicales comme celle-ci reste encore une chose assez rare. On présente plus souvent les syndicats s’opposant entre eux que se réunissant pour entamer des réflexions collectives. Ce temps de formation a permis à différentes équipes syndicales de se rencontrer et il semble que l’initiative a plu. Reste à voir si le rapprochement se fera effectivement sur les lieux de travail comme le prône VISA.