Stanislav Markelov, avocat et fondateur de l’Institut pour l’Etat de droit, avait notamment défendu Anna Politkovskaïa, journaliste abattue à Moscou en 2006, mais aussi de nombreux citoyen-nes tchétchènes, dont des victimes de la prise d’otages du théâtre de Moscou [1]. Ce 19 janvier 2009, Markelov dénonçait lors d’une conférence de presse la libération d’un officier de l’armée russe reconnu coupable d’abus et du meurtre d’une jeune Tchétchène.
Née en novembre 1983 à Sébastopol en Ukraine soviétique, Anastasia Babourova était journaliste et étudiante à l’Université de Moscou. Elle travaillait en tant que journaliste free-lance pour le quotidien russe Novaïa Gazeta et avait notamment documenté l’activité de groupes néo-nazis et les crimes racistes commis par ces derniers. Anastasia Babourova, qui couvrait la conférence de presse de Markelov pour son journal, a été tuée sur le trottoir alors qu’elle essayait de venir en aide à Markelov qui venait de se faire tirer dessus [2].
La fin des années 2000 a été marquée par une activité intense des groupes nationalistes radicaux. En Russie en 2008, au moins 525 personnes ont été victimes de violences racistes et xénophobes, et 97 en sont décédées. Galina Kozhevnikova notait dans un rapport dédié qu’il s’agissait d’une estimation très conservatrice et précisait :
La violence raciste et néonazie continue de s’intensifier, bien qu’il soit de plus en plus difficile de documenter ce sujet. Cependant, la société russe se désintéresse clairement de ces crimes et la couverture médiatique à leur sujet a diminué, les autorités politiques ne souhaitant toujours pas rendre ces informations publiques, et souvent les militants d’extrême droite eux-mêmes font tout ce qu’ils peuvent pour déguiser leurs activités racistes en crimes ordinaires, s’assurant ainsi qu’ils passent inaperçus par des observateurs extérieurs. [3]
En novembre 2009, deux militant-es néo-nazies ont été arrêtée-es puis reconnu-es coupables des meurtres de Babourova et Markelov par un tribunal de Moscou en avril 2011. En juillet 2015, un troisième néo-nazi, chef de l’Organisation de guerre des nationalistes russes, était reconnu coupable d’avoir prémédité et organisé ces assassinats ciblés.
Depuis 2010, une marche antifasciste est organisée dans les rues de Moscou le 19 janvier, en mémoire à Anastasia Babourova et Stanislav Markelov. Lors de la marche de 2016, les manifestant-es scandaient : « Les fascistes tuent et le pouvoir les couvre ».
Les antifascistes russes seront à nouveau présent-es dans la rue ce 19 janvier 2020. Voici une traduction du texte signé du Comité 19 janvier appelant à cette marche [4] :
Le 19 janvier, la marche antifasciste annuelle à la mémoire de l’avocat Stanislav Markelov et de la journaliste Anastasia Baburova, tués par les nazis il y a 11 ans, se tiendra à Moscou.
Le contexte actuel et les évènements de l’année écoulée résonnent avec cette commémoration. Citons aujourd’hui des dossiers falsifiés, des actes de torture et de répression contre des militants et des citoyens ordinaires (affaire Network [5], procès de Moscou [6]), la montée du mouvement écologiste (Shies et autres projets [7]), la lutte des étudiants en solidarité avec leurs camarades condamnés, la lutte contre les violences domestiques et les campagnes féministes, les répressions contre l’opposition ingouche, la fermeture d’hôpitaux et les campagnes syndicales des médecins contre la destruction de médicaments génériques, la propagande impériale et xénophobe dans les médias russes...
Le mouvement social en Russie a grandement besoin d’unité et de solidarité. Stas Markelov et Nastya Baburova se sont attaqués aux problèmes listés ci-dessus avec acharnement - et l’ont payé de leur vie. Nous sommes convaincus que leur mémoire et la poursuite de leur lutte permettrait de mieux nous rassembler, militants syndicaux et politiques, militants des droits humains et des citoyens engagés. Participez à la marche et venez vous informez !
Comité 19 janvier