L’Entr’Aide Ouvrière veut licencier un délégué du personnel

La casse du social ne cesse d’avancer. L’Entr’Aide Ouvrière (EAO) n’y échappe pas. La direction sous la responsabilité du Conseil d’Administration de cette association devient de plus en plus gestionnaire au détriment des droits des salariés et des usagers. Cette même direction réprime. Cette fois c’est un délégué du personnel de la liste CGT qu’elle veut licencier. Voici le tract de la section SUD, intitulé « Non au licenciement de notre camarade ! Solidarité ».

L’Entr’Aide Ouvrière (EAO) est une association de Tours du secteur social. Elle gère des foyers et des appartements pour y héberger des familles. Elle a aussi un service d’insertion professionnelle. La direction générale de cette association réprime les salariés et les militants syndicaux qui résistent à ses décisions conduisant au non respect de droits de salariés et à la dégradation des conditions de travail.

La section SUD de l’Entr’Aide Ouvrière a rédigé et diffusé ce texte pour exprimer sa solidarité envers notre camarade et demander la suspension du directeur général.

Projet de licenciement d’un délégué du personnel

Un des délégués du personnel de la liste CGT de l’Entr’Aide Ouvrière est sous le coup d’une procédure disciplinaire pouvant conduire à un licenciement pour faute lourde. Entre janvier et mars 2015, l’employeur a engagé 3 procédures disciplinaires à l’encontre de notre collègue dont 2 avec une mise à pied conservatoire pour lesquelles l’Entr’Aide Ouvrière envisageait le licenciement :

  • Pour les deux premières procédures, notre collègue a été sanctionné d’un avertissement et d’une mise à pied de 3 jours sans salaire. Pour ces 2 sanctions, l’employeur lui reproche d’avoir mal organisé un chantier ; d’avoir agressé et menacé un collègue.
  • Pour la troisième procédure, l’employeur a pris la décision de licencier notre collègue pour faute lourde : il lui est reproché d’avoir volé du matériel appartenant à l’Entr’Aide Ouvrière. Notre collègue s’est lui-même dénoncé et il a restitué le matériel pour mettre un terme à l’enquête judiciaire.

Il y a donc eu 3 procédures d’engagées contre notre camarade ; seule la dernière, portant sur le vol amène l’employeur à retenir la sanction la plus lourde dans l’échelle disciplinaire : licenciement pour faute lourde.

Comité d’entreprise extraordinaire du 19 mars 2015

Étant salarié protégé de par son statut de délégué du personnel, l’employeur est obligé de demander l’avis du Comité d’Entreprise (CE) s’il envisage le licenciement. De même il doit en demander l’autorisation à l’Inspectrice du travail. Celle-ci doit mener une enquête afin d’autoriser ou pas le licenciement.

Notre camarade est en arrêt de travail depuis plusieurs mois ; il a d’ailleurs été hospitalisé pendant une partie de la durée de son arrêt. Il n’a pu donc se rendre aux différents entretiens préalables avant sanction, tels que prévus dans la procédure.
De même, notre camarade n’a pu se rendre à la réunion extraordinaire du CE du 19 mars 2015, organisée par l’employeur afin qu’il explique sa version sur les fautes reprochées.

Position de SUD : les élus de la liste SUD ont quitté cette réunion en expliquant qu’ils ne pouvaient donner un quelconque avis, si l’une des parties n’était pas présente (voir PV CE extraordinaire du 19/03/2015). Comment donner un avis – à propos d’un projet de licenciement — si notre camarade, n’étant pas présent (il était hospitalisé), ne pouvait exposer sa version ?

Par contre, les élus de la liste FSU sont restés. Ils ont participé à la discussion et deux d’entre eux ont voté pour exprimer un avis favorable au licenciement pour faute lourde de notre camarade. Trois autres ont refusé de voter. Nous regrettons vivement que deux élu-es des listes FSU puissent être favorables au licenciement d’un collègue, alors qu’ils n’ont que la version de l’employeur pour étayer leur vote.

Nous ne pouvons pas accepter qu’un salarié-e, quel qu’il soit, se fasse licencier pour faute lourde uniquement à charge. En procédant ainsi, l’employeur bafoue un droit fondamental de notre démocratie sociale : le droit de se défendre et d’être assisté

Acharnement et répression syndicale

Depuis plusieurs années, notre camarade, comme d’autres élus de la CGT (le délégué syndical CGT, en arrêt de travail depuis quelques mois, a aussi été sanctionné d’un avertissement) a été poussé à bout. Il a dû faire appel à plusieurs reprises aux Prud’hommes pour faire respecter ses droits. De même, il a été obligé d’intervenir de nombreuses fois sur des questions de sécurité au travail et pour que certains chantiers des espaces verts puissent être organisés en respectant la dignité de tous les salariés y intervenant, comme la mise en place de conditions décentes pour se restaurer le midi. Il est impossible d’en établir une liste exhaustive de ce qu’il a dû entreprendre dans ce but.

La Direction Générale l’a vraiment poussé à bout. Le vol du matériel est une sorte de « suicide professionnel », dont le directeur général porte l’entière responsabilité. De ce point de vue, le Conseil d’Administration serait inspiré s’il envisageait l’hypothèse de le sanctionner. Cela permettrait peut-être de calmer des tensions qui se font jour en raison du comportement « autistique » du Directeur Général.

Mais comment en est-on arrivé à cette situation ?

Depuis plusieurs années une nouvelle organisation par pôles a été mise en place au Service d’insertion par l’activité économique (SIPAE). Ainsi des salariés, en grande majorité promus au groupe 5, ayant le statut de « chef d’atelier » sont chargés « d’organiser » le travail au sein des pôles dont on leur délègue la responsabilité. Autrement dit, des salariés n’étant pas cadre, puisque qu’ils sont groupe 5, peuvent user d’autorité sur leurs collègues.

Pour exemple : un salarié, élu au Conseil d’Entreprise, a été empêché à plusieurs reprises d’exercer son mandat par son chef d’atelier. Ou bien, certains de ces chefs d’atelier font plus que donner leur avis à propos des congés de leurs collègues.

Depuis sa création, nous n’avons de cesse de dénoncer cette organisation en pôle, comme la CGT et la FSU. Nous pensons, d’une part, qu’elle est porteuse de dysfonctionnements et, d’autre part, qu’elle n’a d’autre but que de rentabiliser les chantiers et ce au détriment des actions de formation et d’insertion professionnelle auxquels ont droit tous les salarié-es embauché-es en contrat aidé [1].
Dans bien des pôles, on voit des salarié-es en insertion qui s’organisent tout seuls pour effectuer les tâches qui leur sont assignées, bien sûr sous couvert « d’autonomie ».

C’est un véritable détournement auquel procède la Direction Générale, avec l’aval du Conseil d’Administration, pour que les chantiers deviennent rentables et que certains pôles (maintenance, propreté…) remplissent des fonctions indispensables au bon fonctionnement de l’EAO à moindre coût. Rappelons qu’un salarié embauché en CDDI coûte à l’association environ 1 € de l’heure !

Cet homme est dangereux ! Nous demandons sa suspension

Face à nos interpellations, les réponses du directeur général relèvent toujours de la même logique : celle de Pinocchio !

A chaque fois que les élus font part de dysfonctionnements liés à l’organisation par « pôles », le directeur général feint de découvrir la situation et déclare qu’il se renseignera auprès du Directeur de l’emploi et de la formation et verra avec lui pour éviter que cela se reproduise.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, rien ne change, et ce depuis plusieurs années !

Les « réponses » du Directeur Général font preuve d’un mépris vis-à-vis des élus dans les instances représentatives du personnel ; il n’a que faire de celles-ci. Il prend les représentants du personnel et des organisations syndicales pour des imbéciles.
Dans ce contexte, certains craquent. Nous le répétons, notre camarade a été jusqu’à se suicider professionnellement.

Nous demandons que le Conseil d’Administration organise une rencontre avec l’ensemble des organisations syndicales présentes à l’Entr’Aide Ouvrière afin de discuter et d’envisager des solutions pour essayer d’avancer vers le respect des élus du personnel, des représentants des organisations syndicales, du droits des salariés et des usagers.

Balance : deux poids, deux mesures !

Le Directeur de l’emploi et de la formation a été condamné en 2012, (avec 2 autres personnes) par le tribunal correctionnel pour escroquerie. Il avait autres établi une fausse facture de 56 000 € dans le cadre de l’exercice de ses responsabilités au sein de l’Entr’Aide Ouvrière [2]. Sanction : il a été rétrogradé.

Notre camarade vole du matériel et ensuite le restitue. Sanction envisagée : licenciement pour faute lourde, c’est-à-dire qu’il ne touchera rien si l’employeur arrive à ses fins. Le premier est un cadre ; le second est un salarié de base. De là à penser qu’il y a deux poids, deux mesures, il n’y a qu’un pas que nous franchissons !

On est bien obligé de poser au moins une question : par quelles barbichettes certains en tiennent d’autres ?

Certains ne sont quasiment jamais sanctionnés ou très légèrement compte tenu des faits reprochés, comme d’émettre une fausse facture ou entrer dans des locaux de l’Entr’Aide Ouvrière, en-dehors de leurs heures d’ouvertures, pour venir chercher du matériel, comme des planches ?

Pourquoi le Directeur Général vient de signer une nouvelle note de service, alors qu’il y a un article dans le règlement intérieur prévoyant ce type de situation ?

Section SUD de l’Entr’Aide Ouvrière

Notes

[1CDDI : Contrat à Durée Déterminée d’Insertion. C’est ce qu’on appelle un contrat aidé dans la mesure où l’employeur est aidé financièrement pour la rétribution du salaire. Il paie un salaire au salarié embauché dans le cadre d’un contrat aidé. Avec l’aide des subventions apportées principalement par l’Etat, en fait, l’employeur ne débourse qu’un peu plus d’un euro de l’heure pour chaque salarié embauché en contrat aidé.En contre partie, il doit assurer un encadrement en vue d’une formation et une aide à l’insertion professionnelle. Il y a actuellement 134 postes en CDDI à l’EAO financés par l’Etat.

[2Voir NR du 06/03/2012