Fin 2011, le docteur Huez reçoit en urgence un salarié d’une entreprise sous-traitante d’EDF sur le site de la centrale nucléaire de Chinon. A l’époque, il exerce comme médecin du travail sur le site. Et il établit un certificat attestant d’une pathologie anxio-dépressive « en rapport avec un vécu de maltraitance professionnelle ».
Orys, l’entreprise sous-traitante, sera plus tard condamnée pour le harcèlement moral du salarié concerné, mais cela ne l’empêche pas de porter plainte contre le docteur Huez devant l’ordre des médecins. Une pratique qui tend à se généraliser « pour effrayer les médecins du travail qui agissent dans l’intérêt exclusif de la santé des salariés », d’après le docteur Huez.
Cette plainte vaudra au médecin (désormais retraité) un avertissement de la chambre nationale disciplinaire de l’ordre des médecins, assorti de l’obligation de devoir verser à la société ORYS une somme de 1 000 euros « au titre des frais exposés par celle-ci ». Suite à cette décision du 26 septembre 2016, le docteur Huez a fait appel devant le Conseil d’Etat, estimant que les plaintes d’un employeur auprès de l’ordre des médecins n’étaient pas recevables.
Mais l’entreprise Orys n’a pas attendu la décision du conseil d’Etat pour lancer à l’encontre du médecin un commandement de saisie-vente pour récupérer ses 1 000 euros. Et le 10 mars 2017, le docteur Huez a subi un nouveau commandement d’huissier valant saisie formelle sur ses véhicules.
Dans une lettre ouverte publiée sur un blog Mediapart, l’ancien médecin du travail écrit :
« Je considère que cet acharnement qui confine au harcèlement par la Société ORYS à mon encontre, vise à sanctionner la pratique de médecine du travail indépendante de toute pression que je crois avoir exercé, et que son objet est de faire peur aux médecins qui attestent médicalement d’un lien entre l’atteinte à la santé de leur patient et leurs conditions de travail. »
Il dénonce ensuite le manque de réaction de la direction de la centrale nucléaire de Chinon, qui ne l’a jamais soutenu. Au contraire, la direction du site a salué l’entreprise sous-traitante pour son exemplarité en matière de prévention du « facteur humain » concernant la sûreté nucléaire.
Dans un communiqué, le collectif 37 « Notre Santé en Danger » a annoncé la constitution d’un mouvement de soutien au médecin, et a dénoncé les attaques dont il est victime :
« Le Collectif 37 "Notre Santé en Danger", dénonce les attaques à l’encontre de Dominique HUEZ, médecin du travail, condamné par le Conseil de l’Ordre pour avoir osé faire le lien entre la pathologie d’un salarié et ses conditions de travail. Aujourd’hui il est victime de l’acharnement de l’employeur "ORYS", condamné aux Prudhommes à donner 100000 € à ce salarié. Le Dr HUEZ se retrouve en but aux huissiers qui veulent saisir ses 2 véhicules. »