Des faucheurs d’OGM en procès

Le 9 avril dernier, un procès en appel de faucheurs de plantes OGM s’est déroulé à la cour d’appel d’ Orléans. Historique de cette affaire qui dure depuis juillet 2010, tiré d’un dossier réalisé par la Confédération paysanne d’Indre-et-Loire.

Historique des faits

Samedi 24 juillet 2010, au cours d’une action non violente, 119 faucheurs volontaires ont neutralisé, dans la région de Tours, 2 parcelles de démonstration de tournesol muté résistant à un herbicide. Il s’agit de 6000m² d’un essai, piloté par Pioneer sur la commune de Saint-Branchs (37320), de la variété « Express Sun » résistant à l’herbicide « Express SX » produit par la firme DuPont. La seconde parcelle, de 150m² sur la commune de Sorigny (37250), était mise à disposition de Caussade Semences (semencier français) pour y semer la variété « Imeria CS Clearfield » résistant à l’herbicide « Pulsar 40 », tous deux produits de la firme BASF.

Les médias ont été conviés à assister à une partie de l’action de désobéissance civile menée à visage découvert et aussitôt revendiquée. La liste des participants, établie par eux-mêmes, a été remise aux autorités à la suite de l’action. Le soir même, 32 participants ont été auditionnés dans 4 gendarmeries aux alentours.

Le 27 novembre 2012, pour la première fois en France, un tribunal est amené à juger une action de faucheurs volontaires ciblant des plantes mutées VrTH, c’est à dire issues d’une technologie qui modifie leur génome afin de les rendre tolérantes à des pesticides. La justice a arbitrairement convoqué 3 personnes alors que 74 comparants volontaires ont demandé à être jugés avec les 3 faucheurs en revendiquant le caractère collectif de l’action. Après une suspension de séance, le Président a refusé d’entendre les comparants.

Considérant que le procès ne serait pas équitable, les 3 prévenus ont dessaisi leurs avocats du dossier et ont refusé de participer à leur procès en quittant la salle d’audience. Cinq des six témoins cités par les faucheurs ont également refusé de témoigner en l’absence des prévenus et de leurs avocats. C’est donc sans prévenus, sans comparants volontaires et sans témoins que s’est déroulé le procès qui devait être celui des plantes génétiquement modifiées (PGM) issues de la mutagénèse qui, aux yeux des faucheurs, présentent des risques analogues à ceux des PGM issues de la transgénèse [1] .

Le 25 mars 2013, le tribunal correctionnel de Tours a rendu son jugement. Sur les trois prévenus, deux ont été condamnés à trois mois de prison avec sursis. Le troisième a été relaxé, le tribunal n’ayant pas pu établir avec certitude sa participation matérielle aux faits car « sa seule revendication d’y avoir participé […] ne saurait pas [...] suffire ».

5.500€ sont requis pour le préjudice moral et matériel des deux agriculteurs. Le tribunal a aussi condamné cinq des six témoins à une amende de 350 euros pour avoir refusé de répondre aux questions des magistrats juste après que les faucheurs aient tous ensemble quitté la salle d’audience. Les deux faucheurs condamnés font appel, ainsi que le procureur qui conteste la relaxe. Le procès en appel a eu lieu le 9 avril 2014 devant la Cour d’appel d’Orléans.

Les raisons de faucher ces plantes

• Problèmes de santé non évalués.
• Risques de dissémination et de croisements avec des plantes sauvages de la même famille (particulièrement flagrant dans le cas du colza).
• Manque d’expertises objectives sur le sujet et conflits d’intérêts majeurs, la plupart des études étant directement produites par les sociétés qui commercialisent ces produits.
• Irréversibilité de la pollution génétique induite par ces plantes pesticides.
• Préjudices majeurs à la biodiversité tant animale que végétale.
• Augmentation de la résistance des plantes sauvages aux herbicides utilisés.
• Hausse des ventes et de la consommation de pesticides agricoles liés aux PGM et des pollutions liées.
• Question essentielle du brevetage et de la confiscation du vivant.
• Pillage des ressources génétiques mondiales et de l’environnement par quelques entreprises.
• Incompatibilité avec le droit à la souveraineté alimentaire.
•Incompatibilité avec le respect des droits sociaux et environnementaux des paysans et des peuples autochtones, notamment au Sud, qui sont extrêmement menacés par ce type de cultures.
• Incompatibilité avec la préservation, la production, l’échange de semences paysannes.

Pour un compte rendu et une analyse du procès du 9 avril 2014, voir l’article sur Reporterre.

Photo prise lors du procès de Tours, tirée du site Demain le grand soir.

P.-S.

Polemix et La Voix Off avaient suivi le procès du 26 novembre 2012. C’est à écouter ici : http://www.polemixetlavoixoff.com/proces-de-faucheurs-volontaires-dogm/

Notes

[1Pour une explication des termes mutagenèse et transgénèse, voir cet article http://www.consommersansogmenregioncentre.org/sinformer/85-transgenese-et-mutagenese-.html