« Anthroposophie et éco-fascisme », retour sur la figure de Steiner

Contre une certaine « infiltration » d’une pensée ésotérique dans les milieux dits alternatifs, les éditions Chimères traduisent et mettent à disposition le texte « Anthroposophie et éco-fascisme », de Peter Staudenmaier. L’ouvrage met en relief les liens évidents entre le courant de pensée initié par Steiner et les mouvances d’extrême-droite.

L’anthroposophie est un courant de pensée ésotérique et religieux créé par Rudolf Steiner au début du XXe siècle. Pseudo-science, elle fait pourtant des émules dans plusieurs domaines et notamment l’éducation (pédagogie Steiner-Waldorf [1]) et l’agriculture (biodynamie). Une capacité à s’infiltrer dans de nombreux cercles d’autant plus forte que ce courant de pensée possède des appuis politiques [2] et économiques [3] solides — et (néo)libéraux.

Il ne faudrait cependant pas oublier les liens historiques — et toujours d’actualité — entre ce courant et l’extrême droite. A ce titre, les relations entre Steiner et le nazisme, entre l’antroposophie et le ruralisme fascisant de Vichy ne doivent pas être occultés. Faire émerger ce passé est une des volonté de Peter Staudenmaier dans son ouvrage Anthroposophie & Ecofascisme. Comme le souligne Grégoire Perra, ancien enseignant dans les écoles Steiner-Waldorf, l’auteur, dans son ouvrage :

« démonte (...) avec brio les contre-vérités répandues par les anthroposophes au sujet de leur passé, débusque avec précision les mécanismes qui aujourd’hui encore les conduisent à occulter les faits savamment plutôt que de les admettre, ou comment ils procèdent à la mise en accusation et à la diabolisation de leurs détracteurs plutôt que de s’incliner devant la vérité ».

Pour la première fois, une traduction de cet ouvrage est téléchargeable sur le site des Editions Chimères.

S’il a été décidé de faire aujourd’hui le choix de publier cette brochure, c’est parce qu’il est possible de constater et ce depuis de trop nombreuses années, une certaine « infiltration » d’une pensée ésotérique dans les milieux dits alternatifs, écologistes, libertaires ou anarchistes. Cette « bienveillance » créé des ravages parce qu’elle induit une incapacité à penser le monde, la lutte et l’exploitation de manière rationnelle. Elle est une porte grande ouverte sur le monde du conspirationnisme et s’inscrit dans un cadre réactionnaire et fasciste.

L’anthroposophie est une source majeure et première de cette pensée et les imposteurs, de Rahbi à « Kokopelli », puisent directement leurs idées et rhétoriques dans ce bourbier. C’est entre autres ce que permettait de saisir les différents articles de Jean-Baptiste Malet publiés dans Le Monde Diplomatique :

À celles et ceux qui font encore trop souvent référence à ces mouvements et qui pensent encore que Steiner était avant tout un humaniste, nous conseillons vivement la lecture de ces différents articles et traduction.

Notes

[1En Touraine elle se concentre autour de deux structures "éducatives" : une école maternelle (École Maternelle alternative du Petit Pommier) et une école primaire (Ecole primaire Primavera).

[2Notons, par exemple, plusieurs lobbys européens dont l’International Federation of Anthroposophic Medical Associations (IVAA), l’European Scientific Cooperative on Anthroposophic Medicinal Products (ESCAM), l’European Council for Steiner Waldorf Education (ECSWE) et l’European Federation of Patients’ Associations for Anthroposophic Medicine (EFPAM) — pour plusieurs centaines de milliers d’euros déclarés pour leurs activités de lobbying. Rappelons en outre la grande proximité de l’ancienne ministre de la Culture Françoise Nyssen avec ce courant.

[3Si l’on cumule les euros d’actifs au sein des banques Triodos, GLS et dans une moindre mesure La Nef, ce sont plusieurs dizaines de milliards qui sont donc en gestion dans des établissements fondés et dirigés par des anthroposophes.