1983 : la marche pour l’égalité

Mogniss H. Abdallah, auteur de Rengainez, on arrive ! Chroniques des luttes contre les crimes racistes ou sécuritaires (éd. Libertalia, 2012), avait été invité au mois d’avril à Tours par l’association DNSI 37 pour parler des luttes de l’immigration et des quartiers confrontés à l’oppression raciste et sécuritaire. Dans cet entretien avec CQFD, il revient sur la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983, ainsi que sur les suites du mouvement.

En ces temps de célébration unanime et de récupérations diverses (notamment par Canal+ à travers un film qu’il coproduit et une émission de divertissement qui a parodié la marche de manière plus que douteuse), réfléchir sur ce qu’était la marche pour l’égalité sans l’idéaliser apparaît indispensable.

Extraits de l’entretien :

Pendant la Marche, on a été un peu le poil à gratter en maintenant la pression sur la dimension des crimes racistes et des violences policières, dimension qui a été édulcorée, notamment par les socialistes pour lesquels il était hors de question de toucher aux rouages de l’État. Les médias aussi ont lourdement insisté sur une dimension non-violente et œcuménique, citant à l’envi Gandhi et Martin Luther King, valorisant même des scènes de fraternisation avec les motards de la police. Nous avons avec des associations ou groupes indépendants organisé des forums Justice y compris sur le parcours de la marche et nous avons vu notre position renforcée à la fin de la Marche à cause de l’effet provoqué par la défenestration du train Bordeaux-Vintimille, le 14 novembre, de Habib Grimzi, un jeune touriste algérien, par trois légionnaires. A la même période, un rassemblement des familles de victimes de crimes racistes s’est constitué, qui deviendra plus tard les « Folles de la place Vendôme », sur le modèle des Mères de la place de Mai en Argentine.

(...)

Je me souviens de l’étape de Grenoble qui a été la plus multi-communautaire avec un inter-collectif qui réunissait des Espagnols, des Turcs, des Portugais, des Italiens. C’est intéressant de le rappeler par rapport au pli « Marche des beurs » qui a été pris. Cette appellation est fausse et énerve tout le monde, mais il y a bien eu une tendance à réduire la marche à une dimension franco-maghrébine. L’affiche de la Marche, où on voit un gars qui marche avec une babouche et une charentaise donne déjà cette tonalité-là. Mais ça ne correspond pas à la volonté initiale de marquer la légitimité de la présence des gens issus de l’immigration, toutes origines confondues.

Lire tout l’entretien sur le site de CQFD.