En ces temps de célébration unanime et de récupérations diverses (notamment par Canal+ à travers un film qu’il coproduit et une émission de divertissement qui a parodié la marche de manière plus que douteuse), réfléchir sur ce qu’était la marche pour l’égalité sans l’idéaliser apparaît indispensable.
Extraits de l’entretien :
Pendant la Marche, on a été un peu le poil à gratter en maintenant la pression sur la dimension des crimes racistes et des violences policières, dimension qui a été édulcorée, notamment par les socialistes pour lesquels il était hors de question de toucher aux rouages de l’État. Les médias aussi ont lourdement insisté sur une dimension non-violente et œcuménique, citant à l’envi Gandhi et Martin Luther King, valorisant même des scènes de fraternisation avec les motards de la police. Nous avons avec des associations ou groupes indépendants organisé des forums Justice y compris sur le parcours de la marche et nous avons vu notre position renforcée à la fin de la Marche à cause de l’effet provoqué par la défenestration du train Bordeaux-Vintimille, le 14 novembre, de Habib Grimzi, un jeune touriste algérien, par trois légionnaires. A la même période, un rassemblement des familles de victimes de crimes racistes s’est constitué, qui deviendra plus tard les « Folles de la place Vendôme », sur le modèle des Mères de la place de Mai en Argentine.
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Je me souviens de l’étape de Grenoble qui a été la plus multi-communautaire avec un inter-collectif qui réunissait des Espagnols, des Turcs, des Portugais, des Italiens. C’est intéressant de le rappeler par rapport au pli « Marche des beurs » qui a été pris. Cette appellation est fausse et énerve tout le monde, mais il y a bien eu une tendance à réduire la marche à une dimension franco-maghrébine. L’affiche de la Marche, où on voit un gars qui marche avec une babouche et une charentaise donne déjà cette tonalité-là. Mais ça ne correspond pas à la volonté initiale de marquer la légitimité de la présence des gens issus de l’immigration, toutes origines confondues.
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