Pour Jean Germain, la bière n’est pas assez chère à Tours

Aux yeux du maire, la bière à 2,50 euros entretient la soûlographie. Apparemment, il n’a jamais goûté la Navigator. Et ce type de discours en dit long sur le personnage et sa vision de la ville.

La Nouvelle République se faisait le 5 février l’écho des difficultés des commerces de bouche du quartier Plumereau qui se sentent abandonnés par la mairie et mis sous pression par les associations d’habitants. La première ne leur organiserait pas assez d’activités dédiées et, comble du mépris, ne décorerait pas assez leurs rues au moment de Noël ; quant aux seconds, apeurés par les populations et pratiques dangereuses des soirées tourangelles et insupportés par leur bruit, ils appuient la mairie dans sa démarche d’aseptisation du quartier.

Sur ce second point, on ne peut donner tort aux tenanciers et s’interroger sur les motivations de ces propriétaires qui, après avoir acheté dans le centre, notamment pour profiter de son activité et de tarifs relativement faibles — grâce justement aux nuisances sonores du quartier —, souhaitent mettre fin à toute vie nocturne. L’actuel maire de Tours, Jean Germain, ne s’est jamais montré un grand ami des noctambules, préférant soigner les oreilles et l’entre-soi de son électorat bourgeois ; on ne peut donc s’étonner qu’il prête une oreille attentive à ceux qui veulent transformer le Vieux-Tours en joli musée silencieux ... A moins que son ambition ne soit ailleurs ?

Interrogé par la Nouvelle République, celui-ci la révèle sans ambages en déclarant :

Je ne me désintéresse pas du Vieux-Tours, nous avons d’ailleurs fait les vœux à la salle Ockeghem. Ce que j’aimerais surtout c’est que la place Plumereau et le quartier montent en gamme. Cela ne veut pas dire augmenter les prix mais la qualité. Quand je vois que certains établissements vendent la bière à 2,50 euros, entretenant ainsi la soûlographie, cela m’interpelle.

On ne pourrait être plus explicite... Outre le fait qu’il se contredise immédiatement (il dit ne pas parler du tarif, mais ne parle que du tarif), cette courte sortie nous en dit finalement beaucoup sur le personnage et sa vision de la ville. Si vous n’aviez pas compris avec les projets d’hôtel de luxe, l’expulsion progressive de tout patrimoine social du centre de Tours ou encore l’arrêté anti-mendicité pris en décembre, l’objectif de notre maire est clair : embourgeoiser (encore plus) Tours, à commencer par son centre. Dehors les pauvres, les mi-pauvres et autres prolos, précaires, petite classe moyenne, étudiants sans le sous, bas salaires, chômeurs, etcétéra.

Pour cela, Jean Germain a trouvé un axe de travail formidable : le prix de la bière. Sa sortie reflète bien la fine compréhension qu’à Jean Germain des problématiques économiques des citoyens de sa ville et de la proximité qu’il entretient avec eux... Et nous en dit un peu plus de la ville qu’il veut voir advenir. Sûr qu’on se sentira mieux quand on pourra faire un retrait pénard parce que les salopards qui font la manche en face du distributeur auront été virés par la police municipale et qu’on pourra aller tranquillement s’attabler à des terrasses "bien habitées" entre gens qui savent se tenir et qui peuvent sortir 10 balles pour un verre de (mauvais) Vouvray.

Certains disent encore que Tours est le petit Paris ; pour Jean Germain, qui voudrait voir la grenouille se faire plus grosse que le bœuf, Tours doit devenir comme Paris. Commençons donc par payer nos demis 5€ pièce, demain le maire nous fabriquera des immeubles où on pourra louer 750€ un studio dans une tour près de la gare, et après-demain sûr qu’il nous fourguera une œuvre de Buren...

Mince, apparemment on a manqué une étape... on retourne de ce pas entretenir la soûlographie !

Les acolytes anonymes