Mise à jour : le campement a été évacué par la police ce lundi matin à 6h.
Vendredi à 19h, une assemblée générale s’était réunie sur le campement de migrants du Sanitas, pour faire un point sur la situation. Le président de l’association Chrétiens Migrants y avait dénoncé « une situation qui ne [pouvait] pas se poursuivre » et « la carence inadmissible des services sociaux » ; il rappelait aussi les promesses du maire faites à l’occasion du conseil municipal du 6 juillet et lors de sa visite du campement le 12 août (54 jours après l’installation du camp, donc...). Pendant l’AG, il est apparu nécessaire de renforcer la pression de l’opinion sur la mairie et la préfecture, afin que des solutions dignes et pérennes d’hébergement soient enfin trouvées.
Donc quand on a appris que Serge Babary serait de passage à la Fête de la Gloriette ce samedi, on s’est tous donné rendez-vous là-bas.
A partir de 16h30, une quarantaine de personnes se sont retrouvées sur la plaine de la Gloriette : les migrant-es et leurs soutiens avaient préparé leur apparition en s’équipant de banderoles, tracts, etc., dans l’idée de perturber l’inauguration de la fête par les élu-es. Puisque le maire faisait mine de se désintéresser de la situation du camp et des familles qui y survivent dans des conditions déplorables depuis 72 jours, on allait lui rappeler son existence, ainsi que la responsabilité des collectivités et des services sociaux.
On s’attendait à ce que le maire fasse un discours sur la scène principale, mais on a finalement appris qu’il arriverait à la maison de la Gloriette, où un cocktail était préparé à destination de quelques privilégié-es (la buvette devait pas être assez bien pour eux). On y est donc partis en cortège, avec poussettes, banderoles, mégaphone et slogans : « Des papiers, des logements pour tous », « Assez, assez, du camp du Sanitas », « 72 jours et pas un jour de plus », « Solidarité avec les réfugié-es, réquisition des logements vides ».
Les manifestant-es se sont retrouvé-es face à une poignée d’élu-es déboussolé-es. Et leur ont rappelé les promesses non tenues de la mairie, ainsi que la situation du camp, qui compte de nombreux malades et où des enfants en très bas âge ont été abandonnés par la mairie malgré des chaleurs caniculaires. Des « Babary menteur » et « Babary pourri » ont fusé. Certain-es ont essayé de profiter du cocktail, mais ils se sont fait refouler par les flics municipaux faute d’invitation en bonne et due forme. La porte de la salle a alors été fermée.
Quand l’adjointe aux espaces verts Myriam Le Souef s’est engouffrée à l’intérieur, la foule a ironisé. Mais elle est ressortie avec des bouteilles d’eau et des verres en plastique, distribués aux enfants comme aux adultes. On a alors entendu de nouveaux slogans « Un verre d’eau c’est bien, des logements c’est mieux », « Babary gentil », etc. C’était quand même la première aide concrète apportée par la mairie aux personnes du campement !
Après un moment de flottement entrecoupé de quelques prises de paroles — une femme a notamment rappelé qu’une forte solidarité s’était développée autour du camp —, on a appris que le maire arrivait. Et il est arrivé, sous bonne escorte policière (le nombre d’uniformes avait déjà gonflé à mesure que le temps passait) : deux flics à cheval lui ont ouvert la route jusqu’à la porte de la salle, dans laquelle il a pénétré sous les huées.
Quand Babary est finalement sorti, il a tenté une prise de parole qui a tourné court. Faut dire que c’était mal parti : il a affirmé que la question de l’hébergement « ne pouvait pas être assumée par les mairies », alors même qu’il dispose d’un pouvoir de réquisition des logements vides, et qu’il y existe au moins 5 000 logements vides à Tours [1]. Cris et bousculades ont suivi.
Après que ses promesses non tenues lui aient été rappelées, il a trouvé malin de mettre en cause les associations qui s’investissent quotidiennement auprès des migrant-es. Pour rappel, il a supprimé la subvention dont bénéficiait l’association Chrétiens Migrants, et l’avait directement mise en cause lors du dernier conseil municipal, lorsqu’il avait été interpellé sur la question du campement :
« Et ça fait des années, des décennies, que Chrétiens Migrants et le DAL confondent tout – volontairement bien entendu – mélangent tout, font de l’agitation, utilisent en les mettant devant dans leurs manifs des pauvres gens qui débarquent à Tours, arrivant d’on ne sait où et de plus en plus loin en tous cas... »
Rappelons que si Chrétiens Migrants a facilité l’installation d’un campement au Sanitas, c’est parce que le 115 était — et est toujours — incapable de répondre aux besoins d’hébergement des personnes à la rue.
Après des échanges un peu vifs, le maire est parti visiter la Fête et serrer des paluches, suivi d’une petite troupe de courtisans et de pauvres flics qui tentaient désespérément de contenir les manifestant-es — dont le nombre grossissait au fur et à mesure que les visiteurs de la Gloriette comprenaient de quoi il était question. C’est donc sous les huées et les slogans (« Assez, assez, du camp du Sanitas », « 72 jours et pas un jour de plus », « Solidarité avec les réfugié-es, réquisition des logements vides », etc.). que la visite a eu lieu. Les policiers municipaux se sont fait déborder à plusieurs reprises, et étaient visiblement exaspérés par la détermination des migrant-es et de leurs soutiens à se faire entendre.
Finalement, satisfaits de l’impact de notre action, fatigués par la chaleur, et après avoir bien rigolé quand même, on a laissé le maire faire de fausses promesses aux associations présentes sur la fête, et on est repartis en groupe vers le campement du Sanitas pour préparer de nouvelles actions.
Tant que la mairie ne fournira des solutions de logements dignes et pérennes aux personnes à la rue, les migrant-es et leurs soutiens continueront leur mobilisation !