Rassemblement pour Angelo Garand : « Quand va s’arrêter l’impunité des forces de l’ordre ? »

Six mois après la mort d’Angelo Garand, tué par des hommes du GIGN de Tours, la manifestation qui s’est déroulée à Blois était marquée par la colère et l’émotion.

Une centaine de personnes étaient réunies devant le tribunal de Blois ce samedi 30 septembre. Certaines pancartes montraient d’un côté le visage souriant d’Angelo Garand, de l’autre la mention « Ni oubli ni pardon ». Sur les grilles du tribunal, une banderole portant des traces de sang réclamait « Justice et Vérité pour Angelo ».

Cela fait six mois qu’Angelo Garand est mort, tué par les gendarmes du GIGN venus l’interpeller au domicile familial. En début de semaine dernière, on apprenait que la juge d’instruction avait décidé de mettre en examen les deux tireurs, pour « violences volontaires avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Une information rappelée en début de rassemblement par Aurélie Garand, la sœur d’Angelo :

« On a eu une bonne nouvelle mardi : les deux tueurs sont mis en examen. Mais je voulais vous rappeler à quel point le combat va être dur, et à quel point surtout faut pas baisser les bras pour Angelo. Parce que ce qui est arrivé à Angelo ça peut arriver à n’importe qui. Ils l’ont abattu de sept balles dans le corps, et on doit pas lâcher. (…) Il n’avait que 37 ans, il avait toute la vie devant lui encore. Il a trois enfants, deux petits-enfants. Il avait tellement de choses à vivre que c’est insoutenable pour nous, insoutenable qu’il soit mort si brutalement, avec ces sept balles. »

Elle expliquait ensuite les raisons de cette marche :

« Aujourd’hui, ça fait six mois. Et c’est symbolique. Pour ces six mois, on ne peut pas rester chez nous à rien faire. On doit marcher ensemble. Il faut qu’on marche, il faut qu’on crie notre colère, et qu’on laissera pas faire, et qu’on veut justice. »

Les prises de paroles se sont succédées, avant, pendant et après la marche qui s’est déroulée dans le centre ville de Blois. Ces prises de paroles ont notamment été marquées par des appels à la solidarité entre les familles de victimes. Solidarité illustrée par la présence de la mère de Wissam El Yamni, tué par la police à Clermont-Ferrand en 2012. Accompagnée de trois membres du collectif « Justice et Vérité pour Wissam », elle racontait :

« Il faut beaucoup de courage pour continuer à se battre. C’est très dur, très très dur. Moi je vis dans un cauchemar, je ne me suis pas encore réveillée. Il faut se battre, il faut continuer de se battre. Moi, je me battrai jusqu’à la fin de ma vie. Parce qu’ils m’ont gâché ma vie, ils ont gâché notre vie à moi et à ma famille. Il faut continuer de se battre, pour nos enfants, pour nos petits-enfants. Car les policiers ne nous protègent pas. Il faut que nous nous protégions nous-mêmes. (…) Depuis cette période-là, je ne dors pas. Ils disent qu’avec le temps, on oublie, mais on n’oublie pas. C’est pire, c’est de pire en pire. Vous savez pourquoi ? Parce qu’on n’a pas la justice. On n’a pas la justice ! »

« C’est une exécution pure et simple »

Autres collectifs présents en solidarité, la Voix des Rroms, accompagnée par Raymond Gurême, et le Comité de soutien aux détenus de France. L’occasion de rappeler la violence du monde carcéral, et l’engrenage dans lequel avait été pris Angelo Garand suite à sa première incarcération. L’occasion aussi de rappeler que les premières victimes des crimes policiers appartiennent aux minorités discriminées et stigmatisées. Après une courte prise de parole du fils aîné d’Angelo, visiblement très ému, Raymond Gurême expliquait :

« Nous les gens du voyage, on est des boucs émissaires. (…) Angelo il a été tué pourquoi ? C’était pas un criminel. Tout le monde dans sa vie peut s’égarer, c’est pas pour ça qu’il faut abattre le monde comme des chiens. Alors maintenant, faut résister. Qu’au moins on nous respecte et qu’on respecte nos droits. La justice, c’est pour tout le monde »

Mais il a aussi été souligné que personne n’est à l’abri de cette violence des forces de l’ordre. C’est aussi une question de classe sociale ajoutait Aurélie, en évoquant la mémoire de l’agriculteur Jérôme Laronze, qui a été abattu par les gendarmes venus l’arrêter en Saône-et-Loire au mois de mai dernier.

Au fil de la marche, des slogans contre les violences d’État et contre l’impunité policière ont été scandés. Ont aussi été rappelées les conditions dans lesquelles Angelo Garand a été abattu, ainsi qu’en témoignent ses proches présents au moment de sa mise à mort : sept balles tirées en plein torse, à bout portant. Et Aurélie au nom de sa famille l’a crié avec force :

« Mon père est formel : il n’y a pas eu de sommations, il n’y a pas de légitime défense, c’est une exécution, pure et simple. »

Une membre du collectif Justice et Vérité pour Angelo s’interrogeait au micro :

« Quand va s’arrêter l’impunité des forces de l’ordre ? Quand est-ce qu’on va enfin faire la démonstration que les forces de l’ordre, quand elles abusent de la force, quand elles l’appliquent de cette façon complètement disproportionnée, sans nécessité, eh bien elles ne sont pas au-dessus des lois ? On vient ici pour crier contre cette violence sécuritaire systématiquement impunie. Et on vient aussi dire qu’on veut tous s’unir, être solidaires, pour dénoncer cette violence sécuritaire dont tout le monde peut être victime. Angelo Garand, on t’oublie pas. »

Pour soutenir la famille Garand dans son combat pour la vérité et la justice, vous pouvez vous rapprocher du collectif qui s’est constitué, via sa page Facebook ou directement par mail (justicepourangelo@gmail.com), contribuer à la cagnotte et signer la pétition de soutien.