"Naître père" : retour sur le documentaire pro-GPA diffusé aux Studio

Réactions d’un collectif informel de femmes et d’hommes suite au film/documentaire pro-Gestation Pour Autrui intitulé « Naître Père » de Delphine Lanson, diffusé le 22 janvier dernier au CNP pendant le festival Désir Désirs, au cinéma Studio à Tours.

Il a été retenu que le "choix" de ce documentaire est la manifestation d’une volonté de désinformation totale concernant la question de la Gestation Pour Autrui.

Le documentaire ne développe en rien sur ce que suppose être l’opération de la GPA

  •  en occultant les questions financières liées à l’achat d’ovocytes des mères biologiques et les salaires mensuels que perçoivent les mères porteuses, 
  • en occultant les critères de sélections des couples sur les mères biologiques et les mères porteuses, 
  • en occultant les traitements hormonaux imposés aux mères porteuses afin de maintenir et d’assurer à terme la grossesse, du dit "projet parental". 

Que nous montre-t-il ?

Une femme prête à répondre au désir de parentalité d’un couple, chose extrêmement louable.

Mais que nous montre-t-il ?

Une femme opérationnelle.
Une femme prête à remplir une tâche, un contrat : un acte de grossesse.
Une femme prête à remplir son rôle de ce que doit être une bonne mère porteuse, c’est-à-dire, l’expression d’une générosité pure sans manifester de contrepartie, en gardant le sourire, s’il vous plaît !

Une femme fonctionnelle, réduite à un organe : son utérus.

Enfin, une femme extraordinaire, prête à risquer sa vie, hémorragie, fausse couche, naissance d’un mort-né, pour le bon vouloir d’un individu qui, lui, ne prend aucun risque, si ce n’est d’ouvrir le portefeuille.

Une femme capable de faire abstraction de ses émotions, dans un abandon total de soi, de son corps, outre la souffrance et les complications d’une grossesse à traitement hormonal, est une femme qui se dépasse. C’est cela le surpassement !

Le documentaire est à l’image de nos sociétés performatives, une entreprise du déni, une non-considération d’une partie de la réalité.

Il survole des questions primordiales d’éthiques et n’envisage à aucun moment les répercussions de cette entreprise sur la mère porteuse pendant la grossesse et après l’accouchement, sur l’entourage, le couple de la femme porteuse, la famille, l’enfant issu du "projet parental", ni même sur les agences qui permettent ces transactions.

Il n’ouvre en rien le débat sur la question de la GPA, au contraire, il le clôt et s’impose à notre regard et à notre conscience comme une erreur, un retard des consciences de la part des Français, en suggérant un sentiment de culpabilité, pire, un rejet de l’homosexualité.

Il reconduit et amplifie les confusions entre géniteur et parent, rabattant le second sur le premier : comme si « notre » enfant ne pouvait être que celui de « nos » gènes.

Sous le prétexte du progrès et de l’évolution, la technologie donne l’illusion d’une toute puissance capable de répondre à tous nos désirs (ici le désir d’enfant). Niant à chaque fois un peu plus les limites de notre condition humaine, cette volonté de toute puissance se trouve idéologiquement légitimée par un discours se revendiquant de l’égalité, procédant ainsi à un tour de passe-passe sophistiqué reposant sur la confusion du concept politique d’égalité et du concept biologique d’identité.

La technique tend à minimiser l’aspect "psycho-solo-gisant", voire à annihiler l’expérience sensible — toujours singulière — des individus, perçue comme une faiblesse, un signe négatif de faillibilité de nos sociétés contemporaines. Un non-sens.

Parce que nous sommes doués de sens qu’il nous faut ré-apprendre quotidiennement à respecter, oui, nous sommes faillibles et c’est en cela que réside une part de notre liberté.

Parce que nos émotions sont imprévisibles, elles font peur, parce que le doute est de l’effort déployé à résister, nous sommes incontrôlables, nous ne sommes pas des machines.

Pourquoi répondre à la volonté de deux individus en utilisant et en légalisant la location du corps féminin, plutôt que de répondre à un désir d’enfant abandonné et trouver les moyens de faciliter l’adoption ?

Les couples revendiquent la filiation biologique. Soit, mais c’est un argument peu valable quand la filiation n’est que partielle, d’autant plus lorsqu’elle est soigneusement choisie sur des critères précis par le couple désireux. Sur quels critères ? Ceux du meilleur patrimoine génétique. Cela pose des questions de pratique et de méthode eugéniste.

Jusqu’à combien de fois un donneur de sperme anonyme peut-il être père biologique ? Cela ne poserait-il pas des problèmes d’homogénéisation et de consanguinité ? 

Pour toutes les raisons citées, nous sommes en droit de nous demander aujourd’hui, quel a été le choix politique, clairement idéologique et propagandiste qui a présidé à la programmation de ce film dans le cadre du festival Désir, Désirs ?

Ici, c’est le discours de l’identité de l’individu définie par son patrimoine génétique qui prime sur celle de l’individu qui se construit socialement.