Reportage sur la manif pour Rémi dans Info-Tours : où est la violence ?

Dans un papier au titre évocateur "hommage, haine et combat", Info-Tours revient sur le rassemblement en hommage à Remi Fraisse. L’auteur, Olivier Collet, se pose en défenseur du pouvoir et des forces de l’ordre et oublie que dans pareilles circonstances il faut, a minima, savoir faire preuve de pudeur.

Mercredi 29 octobre avait lieu un rassemblement en hommage à Rémi Fraisse, mort dans le week-end sur la ZAD du Testet d’une grenade lancée par les gardes mobiles. A Tours, environ 200 personnes se sont rassemblées place Jean Jaurès pour dénoncer la violence étatique et la répression qui s’abat notamment autour du projet de barrage de Sivens.

Un brillant reporter n’écoutant que son courage a décidé d’en faire un papier. Olivier Collet nous propose donc un récit de la manifestation au titre évocateur : « Hommage, haine et combat après la mort de Rémi Fraisse ». Car monsieur Collet n’attendait probablement qu’une chose : des débordements de la part de casseurs, d’éléments radicalisés ou autres épouvantails. Manque de chance pour notre journaliste en manque de sensations fortes, rien de tout ça.
Du coup le fin limier a cru déceler du « ressentiment » (sic !). Quand un homme meurt d’une grenade de la gendarmerie nationale en défendant un coin de forêt contre un barrage inutile... Quand Carcenac, président du Conseil Général du Tarn et instigateur du projet trouve judicieux d’ironiser en affirmant que mourir pour des idées c’est « stupide et bête »... Quand la police et l’État tuent ou mutilent dans des manifestations, des interpellations, des expulsions... Avoir du « ressentiment » c’est sûrement déplacé.

L’indignation journalistique est totale. Dans cette manifestation, des militants ont même eu l’outrecuidance de brandir « des pancartes violentes » (sic toujours). Qu’on se rassure, il n’y avait ni fourches ni piques mais du carton et des draps. Ce sont donc bien des mots et des slogans qui ont effrayé monsieur Collet. Il nous le dit d’ailleurs :

Ce qui nous a frappé lors de ce rassemblement, c’est la violence des termes choisis par les manifestants : certains accusent clairement les gendarmes du Tarn d’assassinat. C’est fort. Et peut-être même faux, l’enquête étant toujours en cours.

L’enquête est effectivement encore en cours mais il apparaissait déjà très clairement au moment où monsieur Collet a écrit son article que la mort de Rémi Fraisse est directement liée à l’usage par les gendarmes d’une grenade offensive. Et quand bien même ce ne serait pas le cas, il a été victime d’un contexte de violences initié par l’État et ses forces de répression (qui ont, on le suppose, pour monsieur Collet toute légitimité d’user de la violence). Des forces de répression qui tuent chaque année entre 10 et 15 personnes [1]. Merci monsieur Collet de nous montrer que vous prenez à cœur votre rôle de défenseur de la bonne marche du pouvoir et de catégorisation dans le camp des méchants de tous ceux qui résistent à l’ordre que vous défendez.

Ce qui est violent, monsieur Collet, est-ce de tuer un homme qui défend un bout de nature contre l’avancée d’un monde toujours plus industrialisé ou de trouver cette mort révoltante ? Ce qui est violent, monsieur Collet, est-ce de s’assoir sur la mémoire d’un type de 21 ans ou de crier, pour se rassurer un peu, sa colère contre un État qui autorise tout au nom du profit ? Ce qui est violent, monsieur Collet, est-ce d’envoyer des militaires armés jusqu’aux dents réprimer ceux qui se battent pour un monde meilleur ou que ceux-ci répondent comme ils le peuvent ?

Ce qui est violent, monsieur Collet, ça nous en sommes sûrs, c’est d’être incapable, dans de pareilles circonstances, de faire preuve d’un minimum de décence et de pudeur.

Non, on n’oublie pas. Non, on ne pardonne pas. A personne.

Des porteurs de pancartes

Notes

[1Voir à ce sujet l’interview que Mathieu Rigouste a accordé au site Apparté : La mort de Rémi n’est pas une bavure, c’est un meurtre d’État. Voir aussi l’article de Bastamag - Homicides, accidents, « malaises », légitime défense : 50 ans de morts par la police - qui répertorie tous les décès liés à des opérations de police depuis 1971.