Grève mondiale des employés de fast-foods : « McDonald’s ou KFC divisent pour mieux régner »

Le 15 mai, l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation appelait les salariés de la restauration rapide du monde entier à se mobiliser. Bref échange avec Amel Ketfi, secrétaire fédérale CGT en charge de la restauration rapide.

L’Union internationale des travailleurs de l’alimentation (UITA) appelait les salariés de la restauration rapide du monde entier à manifester ou à se mettre en grève ce jeudi 15 mai. Au début du mois, des représentants syndicaux de 26 pays s’étaient réunis à New-York pour tisser un réseau mondial. L’un des objectifs de ce réseau : mettre la pression sur les géants de la restauration rapide présents partout dans le monde, afin qu’ils acceptent les revendications des salariés ; aux États-Unis, les travailleurs des fast-food se mobilisent depuis trois ans pour obtenir de meilleures conditions de travail, une stabilité de l’emploi, le droit de se syndiquer et surtout un salaire horaire de 15 dollars.

En France, qu’est-ce qui a été organisé en ce jour de mobilisation internationale ?

Des actions ont été organisées à Bordeaux et Paris. La Fédération CGT Commerce et Services avait appelé à la mobilisation, quelle qu’elle soit : grève, manifestation devant un restaurant... L’idée était de faire un buzz sur Internet.

Les travailleurs américains réclament le droit de se syndiquer. Quelle est la situation en France ? Quelles difficultés rencontrent les salariés qui souhaitent s’organiser ? Quels problèmes doivent affronter les organisations syndicales qui tentent de s’implanter dans les entreprises de restauration rapide ?

La première difficulté est liée au turn-over, qui est très élevé. Dans ces conditions, il est difficile de syndiquer les travailleurs. On a quand même quelques « piliers », des personnes qui ont fait carrière dans leur entreprise et s’investissent syndicalement, mais il est très difficile de syndiquer dans le temps et d’impliquer les jeunes salariés du fait de leur bref passage dans l’entreprise. Car la plupart ne viennent y exercer qu’un job temporaire, le temps de finir leurs études ou de trouver un contrat à temps plein.

Mobilisation à Paris devant un restaurant KFC

Par ailleurs, les multinationales comme McDonald’s ou KFC fonctionnent sur le principe « Diviser pour mieux régner. » Ils créent donc un maximum de structures afin que les seuils permettant de mettre en place des instances représentatives du personnel (comité d’entreprise, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, etc.) ne soient pas atteints.

Chez McDonald’s, c’est vrai tant pour les restaurants gérés directement par le groupe que pour les restaurants franchisés [1] Pour les franchisés, c’est facile : pour chaque restaurant, ils créent une entité juridique indépendante. Mais McDonald’s France a réussi à couper l’Ile-de-France en quatre, alors que tous les restaurants de la région sont gérés directement par le groupe. Au lieu d’avoir une entité de 4 000 salariés, on a donc quatre entités, ce qui rend les négociations plus difficiles.

Des initiatives internationales comme celle d’aujourd’hui sont appelées à se reproduire ?

Si cette initiative porte ses fruits — et je pense que ce sera le cas —, de telles actions devraient être renouvelées.

Illustration : photos de la mobilisation aux États-Unis, en Nouvelle-Zélande, au Japon, en Suisse et en Belgique.

Notes

[1A Tours, tous les McDonald’s sont franchisés ; ils appartiennent à Bernard Simmenauer, dont la fortune est estimée par le magazine Capital à 10 millions d’euros.