Bienvenu(e)s en France ! Les citoyens sans droit vous invitent à faire la fête !

Le 10 mai 2014, place Anatole France à Tours, le collectif des citoyens sans droit vous invite à faire la fête ! Venez manifester votre solidarité, vous rencontrer, échanger, écouter des concerts, partager un moment avec les demandeurs d’asile et sans papiers.

Pendant la révolution française, de 1789 à 1791, être citoyen c’était adhérer à la déclaration des droits de l’homme, être étranger c’était ne pas vouloir les accepter comme loi. Il y eut bien ainsi pendant la période révolutionnaire une citoyenneté de fait sans nationalité [1]

De façon significative, c’est le nom de « citoyens sans droit » que s’est donné un collectif de personnes en attente de régularisation, pourtant qualifiés d’étrangers par l’État. Ils sont en France depuis des mois, ils sont en France depuis des années. Ils n’ont commis aucun acte délictueux. Ils travaillent pour un certain nombre. Mais ils ne sont pas reconnus en tant que citoyens, quand bien même ils adhérent aux lois de ce pays.

Situation des citoyens sans droit.

Alors que l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement socialiste pouvait laisser croire à une amélioration de la situation des citoyens sans droit, force est de constater que c’est l’inverse.

Les citoyens sans droit du collectif sont dans différentes situations. Ils peuvent être demandeurs d’asile, ou sans-papiers.

Quelle est la condition des demandeurs d’asile ?

Ils sont en situation régulière sur le territoire, mais dans la crainte permanente que ce droit de séjour leur soit retiré. En effet, seul un cinquième des demandeurs d’asile obtiennent le statut de réfugiés. Ils n’ont pas le droit de travailler. Ils ne sont pas tous logés. Lorsqu’ils ont épuisé tous les recours pour obtenir le droit de séjour, ils sont déboutés du droit d’asile et rejoignent la situation de sans-papiers.

Parmi les sans-papiers se trouvent aussi des gens qui n’ont pas demandé l’asile et sont simplement immigrés pour des raisons diverses.

Quelle est la situation d’un sans-papier ?

Du dossier de demande du droit d’asile non abouti, aux titres de séjour non renouvelés, de récépissés d’attente de 3 ou 4 mois aux autorisations provisoires de séjour de 6 mois, pour lesquels il faut fournir tant et tant de documents, de preuves, d’attestations multiples, il/elle est submergé de papiers, mais jamais les bons. Autrement dit, en ne leur accordant pas le droit de séjourner sur le territoire, l’État fabrique les citoyens irréguliers.

Il les prive ainsi de leur entrée dans le droit commun. Les sans-papiers sont alors sans ressource et peuvent être expulsés à tout moment. Vivant dans une grande précarité, ils ont besoin plus que tout autre de travailler pour vivre. Ces citoyens sans droit, comme tout citoyen, ont besoin de manger, de boire un verre, de prendre le tramway, le bus ou le métro, de voir leurs amis, de nourrir et scolariser leurs enfants, de prendre soin de leurs familles et de leurs proches. Pour vivre, ils doivent donc payer. Ils acceptent alors tous les travaux qu’on leur propose.

Qui sont les plus grands employeurs de sans-papiers ?

Les sociétés du BTP, de la restauration. C’est ainsi que les personnes sans-papiers se retrouvent dans l’obligation de travailler au noir ou sous une fausse identité [2] sur les chantiers, dans les restaurants.

Elles/ils construisent les infrastructures, elles/ils font à manger. L’emploi des sans-papiers permet aux patrons de peser sur les salaires et les conditions de travail de tous, en dérégulant le droit du travail. Leurs collègues ignorent le plus souvent leurs situations, comme les parents d’élèves qu’ils côtoient à l’école de leurs enfants. On estime que les sans-papiers sont un demi-million aujourd’hui en France.

La circulaire Valls

La circulaire du ministère de l’Intérieur, en date du 11 mars 2014, relative aux priorités pour l’année 2014 dans la « lutte contre l’immigration irrégulière », met à jour le double discours de Manuel Valls qui, devant la presse, se targue de rompre avec la « politique du chiffre » pour mieux se féliciter ici de ce que « le niveau total des éloignements forcés atteint son plus haut niveau depuis 2006 », et élaborer un plan destiné, à tous les échelons, à accélérer les reconduites.

Ainsi, ce texte encourage les préfets à user de tous les moyens de coercition, avec le concours de la police : contrôles d’identité ciblés, interpellations des personnes à leur domicile ou dans les foyers où elles sont hébergées, enfermements en rétention, assignations à résidence avec obligation de pointage, retours « volontaires » fortement incités, placements en garde à vue, condamnations pénales des récalcitrants. Les associations et les travailleurs sociaux sont poussés à participer à la localisation et au contrôle des personnes, alors que leur rôle est de les accompagner et de leur porter assistance. Si bien que derrières les effets d’annonces, les gens de terrain font le constat d’un durcissement des conditions des citoyen(e)s sans droit. Le nombre de place dans les lieux d’hébergements connaît des réductions massives, laissant nombre de citoyen à la rue. Les aides économiques sont supprimées.

Peut-on tolérer que des familles se retrouvent à la rue ? Peut-on tolérer que des gens malades soient renvoyés dans des pays où ils n’auront aucun soin [3] ?

Le 10 mai, faisons la fête place Anatole France ! Rencontrons nous !

Les citoyens sans droit, leur comité de soutien, vous appellent à un jour de paix, de fête, de rencontres, et d’élaboration commune. Réunissons-nous, échangeons, informons-nous les uns les autres ! Pour cette journée, créons un lieu où tout être humain est considéré comme citoyen là où il se trouve, sans distinction d’origine, de sexe, ou de couleur de cheveux !

Le 10 mai, les citoyens sans droit vous proposeront de nombreuses animations dans un cadre convivial où vous pourrez vous restaurer : la construction d’un labyrinthe géant symbolisant le parcours administratif des migrants en France, de nombreux concerts, une pièce de théâtre, un espace d’expression graphique, et un espace d’état des lieux. Cette journée de rencontre festive se poursuivra dans les semaines suivantes par des débats dans les cafés de la ville.

Programme du 10 mai.

→ Construction d’un labyrinthe géant
De 8h à 14h, vous pourrez participer à la construction d’un labyrinthe en carton, figurant le parcours d’un étranger demandeur d’asile. Le chantier est ouvert à toutes les bonnes volontés. A partir de 14h, les visiteurs sont invités à franchir les portes du labyrinthe pour un voyage organisé à travers les services d’accueil de l’administration.
→ Représentation théâtrale
A 14h30, 16h30 et 18h30 : sur la scène du théâtre EST, représentation, en avant-première mondiale, d’une « alternative » en trois actes et neuf tableaux intitulée « Le voyage d’un citoyen sans droits »
→ Concerts
Lorsque nous avons évoqué cette journée, de nombreux groupes ont décidé de nous y rejoindre bénévolement et de s’engager à nos côtés. Ils joueront pour vous, à partir de quatorze heure, sur la place Anatole France : concert non-stop dans tous les genres par différents groupes musicaux : Les Volos, Ello Camalle, Belakane, JP Dugazon, Coconut, Carine Achard, Les Ghillie’s, Ambrosio, We go by many names... et d’autres.
→ Espace d’expression graphique
De 14h à 19h, un espace d’expression libre vous est proposé par un plasticien, qui vous invite à investir sous forme picturale une grande toile et les murs du labyrinthe
→ État des lieux
Vous pourrez venir vous entretenir sur la base d’un questionnaire qui vous permettra de formuler ce que vous pensez de différentes questions. Ces entretiens permettront ensuite la composition d’un recueil qui vous permettra de confronter votre pensée à celle des autres.
→ Brigade des clowns
Le rire sera de la partie avec l’intervention des nez rouges de la brigade des clowns de Tours.

VENEZ NOMBREUX !

Le comité de soutien des citoyens sans droit.

Notes

[1Sur ce sujet, vous pouvez consulter « L’impossible citoyen. L’étranger dans le discours de la Révolution française » de Sophie Wahnich, éditions Albin Michel, 2010. Rappelons aussi qu’en Yougoslavie, comme dans d’autres pays de l’est, la citoyenneté était indépendante de la nationalité. Chacun était citoyen sur son lieu de résidence et déclarait sa nationalité de façon autonome. Ce qui explique que certains Yougoslaves aient pu se déclarer de nationalité esquimaude tout en étant citoyen de la fédération.

[2Lorsqu’ils travaillent sous une fausse identité, ils cotisent alors au nom d’un autre. Et lorsque leur titre de séjour n’ est pas renouvelé, ils perdent le droit de bénéficier de leurs cotisations, versées pendant les périodes de travail régulier.