Amiante dans le bitume : pour les élus, la prise en compte de la santé des agents coûte trop cher

Dans un article du 13 novembre 2014, consacré à la présence d’amiante sur les routes du département, la NR s’inquiète des dépenses engagées pour protéger la santé des agents territoriaux travaillant sur le domaine routier départemental. Pour les élus interrogés, le risque sanitaire passe après la question budgétaire.

Sous le titre « Amiante dans le bitume ? Ça coûte 80.000 € par an » [1], le journaliste Olivier Pouvreau aborde la question des dépenses engagées par le Conseil général d’Indre-et-Loire pour respecter de nouvelles règles lors de l’entretien des routes. Des règles qui ont été mises en place pour tenir compte des risques de maladie liés à la présence potentielle d’amiante dans le bitume. Il s’agit de protéger les salariés travaillant à l’entretien des routes. Si la présence d’amiante est avérée, les agents doivent être équipés en conséquence, et une procédure spéciale doit être appliquée.

Mais pour le journaliste, et pour les élus cités dans l’article, la question de la santé ne se pose pas. Tout ce qui compte à leurs yeux, ce sont les dépenses liées à l’application de ces nouvelles règles visant à protéger les salariés. Les termes « santé » ou « maladie professionnelle » n’apparaissent pas dans l’article, alors que selon le Haut conseil de la santé publique, l’amiante pourrait provoquer entre 68 000 et 100 000 décès en France d’ici à 2050.

Le journaliste s’interroge : « C’est coûteux. Est-ce utile ? » Le vice-président PS du Conseil général, Bernard Mariotte, prend un ton inquiétant : « On ne sait pas où l’on ira sur le plan financier. Cela fait peur. (...) Il faudra désamianter la voie, à grands frais. » Le journaliste prévient aussi : si le bitume contient de l’amiante, il y aura « une grosse ardoise à payer ». Pierre Louault, maire UDI de Chédigny, ironise : « Les normes, c’est comme le sexe. Quand c’est fait avec modération, ça va, mais quand c’est fait par des obsédés, ça ne va plus ! » L’élu semble indifférent au fait que ces normes ont été mises en place en réponse à un risque sanitaire. Mais Pierre Louault, qui cumule les fonctions de maire, de président de Loches Développement et de conseiller général, ne doit pas avoir une très bonne compréhension du terme « pénibilité ».

Le syndicat CGT du Conseil général a réagi via un communiqué dans lequel on peut lire :

« Ces déclarations prouvent encore une fois la considération que nos politiques ont des agents du Conseil Général. (...) Doit-on brader la vie des humains sous prétexte que la recherche d’amiante coûte chère ? La maladie n’a-t-elle pas un coût elle aussi ?

Les maladies liées à l’amiante représentent aujourd’hui la deuxième cause de maladies professionnelles et la première cause de décès liés au travail (hors accidents du travail). La prévention de ce cancérogène demeure une des priorités de la santé au travail.

Bon nombre de procès sont en cours au sujet de l’amiante, des bitumes ; n’en rajoutons pas, car ni les salariés, ni les élus n’auront à y gagner ; bien au contraire. »

Pour rappel, le budget du Conseil général d’Indre-et-Loire s’élève à 583 millions d’euros en 2014. Les 80 000 euros dépensés sur l’année pour s’assurer que le bitume ne contient pas d’amiante représentent donc 0,01 % du budget total. Apparemment, aux yeux de certains, c’est encore trop.

Illustration : Boris Drenec