A Grenoble comme à Vendôme, les préfets n’aiment pas l’art de rue

La dénonciation par les autorités de graffitis évoquant les violences policières laisse penser qu’en période d’état d’urgence, la liberté de matraquer prime sur la liberté d’expression.

Ce lundi 27 juin, la diffusion de la photo d’un graffiti représentant deux policiers matraquant une allégorie de la République tombée au sol, a provoqué la colère des autorités locales et nationales. Les député-es du coin, le ministre de l’Intérieur, le directeur départemental de la sécurité publique, le préfet... Tous ont dénoncé une fresque « honteuse », « inacceptable ». Mais ces dénonciations interviennent alors que les images de violences policières se sont multipliées depuis le début de la mobilisation contre la loi Travail, y compris les images montrant des policiers tabassant des manifestant-es au sol.

Ce graffiti, et la réaction des autorités, rappellent un épisode récent survenu à Vendôme, dans le Loir-et-Cher. Monsieur PLUME, auteur d’un graffiti représentant une voiture de police en flammes, s’est attiré les foudres du préfet, qui y avait vu un « appel à la haine contre la police », ainsi qu’un « [douloureux] écho aux événements récents marqués par les violences dont ont fait l’objet des policiers dans l’exercice de leur difficile métier ». Le préfet exprimait aussi « sa plus profonde réprobation devant un tel acte commis de surcroît à proximité d’un établissement scolaire ». Une manière de rebondir sur l’incendie d’une voiture de police à Paris, en marge d’une manifestation de policiers accompagnés d’élus du Front National. Pourtant, le graffiti réalisé à Vendôme renvoyait aux événements de Ferguson, ville américaine dont la population noire s’était mobilisée suite à un crime policier. Le graffiti avait d’ailleurs été réalisé avant l’incendie du véhicule parisien...

Ces réactions — ainsi que celles qui avaient suivi la diffusion d’une affiche de la CGT Infocom dénonçant les violences policières — montrent bien le trouble des autorités quand la liberté d’expression est utilisée pour dénoncer les exactions de la police, en France ou ailleurs. La liberté de matraquer sans contrainte ni critique triomphe.